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Commentaire de Sylvain Rakotoarison

sur Évaluation des ministres : rendre des comptes aux citoyens, est-ce un mal ?


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Sylvain Rakotoarison Sylvain Rakotoarison 5 janvier 2008 14:15

Eh bien, la discussion paraît difficile en ces ‘lieux citoyens’.

Ma foi, ceux qui confondent arguments réfléchis et invectives notamment personnelles se trompent sûrement d’adresse.

Mon propos était de présenter des faits, et de faire un état des avantages et inconvénients sans cacher (car je suis intellectuellement honnête) que je pencherais plutôt du côté des avantages.

Alors, quoi d’autre ajouter pour ceux qui ne savent pas lire ce qui est déjà écrit ?

Insistons cependant sur quelques points :

1. Entre l’état précédent (chaque ministre fait son ‘job’, est promu ou renvoyé selon le caprice du prince ou selon un succès ou échec électoral) et l’état que propose cette évaluation, cela donne un élément supplémentaire d’appréciation pour le citoyen.

Exactement comme l’indice des prix, cette indication est intéressante même si mes dépenses quotidiennes sont, pour mon portefeuille, un élément plus sensible.

Ce qui est important, c’est la nécessité de devoir rendre des comptes de son action. Cela me paraît essentiel si le pouvoir veut respecter ceux qu’il représente. Il suffit de regarder l’absence totale de connaissance non seulement sur l’action mais l’identité même de députés européens. Certains communiquent sans doute mal, mais il faut craindre que d’autres ne font rien. Devoir rendre des comptes, c’est la moindre des choses et redonner un lien de confiance entre les gens et la politique (c’est que qu’ont réussi de faire d’ailleurs les trois principaux candidats à l’élection présidentielle de 2007).

2. Le Premier Ministre François Fillon l’a encore répété aux Antilles (c’est lui qui met en place cette méthode d’évaluation, donc il doit savoir), les ministres ne seront pas évalués par un cabinet d’audit évidemment, d’autant plus que c’est politique.

Le cabine privé n’est intervenu que dans la mise en forme des grilles de critères. Je doute qu’il ait eu une influence sur la définition même des critères, vu que celle-ci est la traduction du programme politique du gouvernement, et je doute encore plus que François Fillon et Nicolas Sarkozy se soient fait dicter leurs lettres communes de mission aux ministres cet été par ce cabinet (soyons donc raisonnable).

Malgré tout, j’ai émis des réserves sur la prestation d’un tel cabinet (c’est écrit dans mon article) et j’ai même poussé le vice en disant que si cette méthode d’évaluation entrait dans les mœurs politiques, elle pourrait être un bon modèle pour qu’un jour (et ce n’est certainement pas une réforme des institutions qui le fera), les parlementaires contrôlent réellement le gouvernement, sur la base d’évaluation de l’action gouvernementale.

3. Concernant l’évaluation des performances individuelles, en entreprise comme dans l’action politique : si les objectifs et les missions sont clairement définies, il est normal de faire le bilan que ce qui aurait dû être fait, quel que soit le contexte (service public, secteur privé, ou action politique).

Je rappelle par ailleurs qu’une bonne délégation nécessite de compléter une réelle autonomie par un contrôle effectif. C’est cela la responsabilité (et la motivation).

Lorsque le contrôle se fait directement par la voie des urnes, il n’y a pas de problème (même Jacques Chirac a été sanctionné, soit par l’échec du référendum de 2005, soit par sa position très faible dans les sondages en 2006 qui l’a dissuadé de se représenter). Le problème pour les ministres, c’est qu’il n’y a aucun verdict électoral les concernant.

4. Pour revenir sur les entretiens d’évaluation en entreprises, la critique, c’est de dire qu’on juge une personne. Évidemment que non, c’est plutôt faire le bilan d’une action. C’est basé sur des faits précis.

Certains employeurs ont peut-être confondu les choses, mais en règle générale, il n’y a aucune note (contrairement par exemple aux carrières d’enseignants où des inspecteurs donnent UNE note tous les dix ans, bravo la carrière et la motivation !) mais un bilan des ‘points forts’ et des ‘besoins de développement’, ces derniers étant souvent la base du plan de formation pour l’année qui suit.

5. Par ailleurs, il ne faut pas voir non plus que cette évaluation diminue l’efficacité.

Le salarié (ou ici le ministre) ne va pas plus se focaliser sur les indicateurs de sa propre évaluation que se concentrer sur ses objectifs, puisqu’ils doivent être, en principe, les mêmes.

6. Bref, cette démarche ne donne qu’un élément supplémentaire pour mieux comprendre (voire mieux contester) la politique gouvernementale, donc c’est un plus, un plus d’autant plus intéressant qu’il apporte ainsi, comme je l’ai noté, une plus grande assise au gouvernement et au Premier Ministre face à un Président de la République dont certains critiquent l’omniprésence (à juste titre).

7. J’ajoute qu’une mauvaise évaluation d’un ministre (qu’il peut renvoyer pour de nombreuses autres raisons par ailleurs) ne serait pas dans l’intérêt de Nicolas Sarkozy qui pourrait recevoir ainsi les critiques tant sur le fond (sa politique est inefficace) que sur la forme (pourquoi s’est-il entouré de ministres inefficaces ?).

D’ailleurs, ce qui est intéressant dans les critères retenus, ce ne sont pas des éléments comme ‘est-ce que mon programme a été mis en œuvre ?’ mais plutôt sur des aspects concrets de la vie quotidienne des gens, donc, sur les VRAIS objectifs (moins de chômage etc.), pas sur les moyens. C’est donc l’influence de l’action du gouvernement qui est évaluée ainsi (donc forcément sur du long terme). Après, on peut toujours contester le choix de certains critères, mais parce qu’on conteste la politique gouvernementale elle-même (par exemple : le quota d’expulsion des sans-papiers). Je ne sais pas si le critère de la dette publique ou du déficit a été adopté (je l’espère).

8. Et enfin, il faut relativiser ce système d’évaluation, car c’est un élément parmi d’autres, et par exemple, les sondages de popularité des ministres sont politiquement bien plus importants qu’autre chose. Enfin, comme avant, rien n’interdit aux citoyens d’avoir leur propre opinion. Ce n’est pas ce système d’évaluation qui va changer les choses à cet égard. Simplement, les citoyens auront des données supplémentaires.

Cordialement.


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