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Accueil du site > Tribune Libre > Le Thorium : la révolution énergétique et nous ?
#40 des Tendances

Le Thorium : la révolution énergétique et nous ?

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Le Thorium et Nous
 
Dans un monde en quête d’énergies propres, le thorium, ce métal radioactif abondant, suscite un regain d’intérêt. Ses promesses – sécurité, faible production de déchets, durabilité – pourraient redéfinir notre avenir énergétique. Pourtant, alors que la Chine avance à grands pas, la France, jadis leader du nucléaire, semble à la traîne. Pourquoi ? La réponse réside non seulement dans des choix stratégiques, mais aussi dans les limites d’une société capitaliste qui peine à s’engager dans des projets nécessitant une intervention massive de l’État.
 
Le Thorium : un potentiel freiné par le marché
 
Le thorium, trois à quatre fois plus abondant que l’uranium, peut alimenter des réacteurs nucléaires, notamment les réacteurs à sels fondus (RSF). Ces derniers offrent des avantages majeurs :
  • Sécurité : Leur conception à basse pression réduit les risques d’accidents graves.
  • Déchets réduits : Les sous-produits radioactifs ont une durée de vie plus courte.
  • Abondance : Les réserves mondiales pourraient fournir de l’énergie pendant des millénaires.
  • Non-prolifération : Le thorium est peu propice à un usage militaire.
Mais le thorium reste marginal. Développer cette filière exige des investissements colossaux et une vision à long terme, deux éléments que le capitalisme, contraint par la rentabilité à court terme, peine à mobiliser. Les marchés favorisent les technologies établies, comme l’uranium ou les renouvelables, au détriment d’innovations disruptives nécessitant des décennies de recherche et des fonds publics massifs.
 
La Chine : l’État au service de l’ambition
 
En 2023, la Chine a franchi une étape décisive avec un réacteur expérimental à thorium de 2 MW dans le Gobi, visant un modèle commercial de 10 MW d’ici 2030. Ce succès s’appuie sur une stratégie où l’État joue un rôle central :
  • Investissements publics : Depuis 2011, Pékin a injecté 444 millions de dollars dans le thorium, via l’Académie chinoise des sciences.
  • Ressources : Les vastes gisements de Bayan Obo garantissent l’autonomie.
  • Planification : Libre des pressions électorales ou des lobbies, la Chine capitalise sur les recherches américaines des années 1960, abandonnées pour des raisons stratégiques.
  • Mobilisation : Des milliers d’ingénieurs et une capacité industrielle inégalée accélèrent les progrès.
Ce modèle, où l’État pilote l’innovation, contraste avec les "démocraties" capitalistes, où les priorités sont dictées par les actionnaires et les cycles électoraux. La Chine, en contournant ces contraintes, s’impose comme leader.
 
La France : victime de la logique capitaliste
 
Il y a trente ans, la France dominait le nucléaire grâce à son parc de réacteurs à eau pressurisée et son expertise (CEA, EDF). Le thorium, étudié marginalement, n’a jamais décollé. Pourquoi ?
  • Choix de l’uranium : La filière uranium, rentable et standardisée, était un actif sûr pour EDF et Areva (aujourd’hui Orano). Le thorium, nécessitant de nouvelles infrastructures, était un pari trop risqué pour des entreprises tournées vers le profit immédiat.
  • Manque de gisements : Sans réserves significatives, la France n’avait pas d’incitation stratégique à investir.
  • Désengagement de l’État : À partir des années 1990, les gouvernements, sous pression des marchés et des mouvements anti-nucléaires ( merci les écolos !), ont réduit les financements pour la recherche nucléaire, privilégiant des solutions à court terme.
  • Logique de marché : La libéralisation du secteur énergétique et la privatisation partielle d’EDF ont détourné les ressources vers la maintenance des réacteurs existants ou des projets comme l’EPR, jugés plus « vendables ».
Cette inertie illustre les limites du capitalisme : sans intervention étatique forte, les projets à long terme, comme le thorium, sont sacrifiés au profit de la rentabilité immédiate. Les actionnaires d’EDF n’ont aucun intérêt à financer des décennies de recherche sans retour rapide, et les gouvernements, soumis aux cycles électoraux, hésitent à s’engager dans des projets impopulaires ou coûteux. Résultat : la France a cédé son leadership à la Chine, où l’État impose une vision stratégique.
 
Vers une société du thorium ?
 
Une « société du thorium » est-elle à portée de main ? Pas encore. Les obstacles techniques (corrosion, gestion des déchets) et économiques (coûts d’industrialisation) persistent. Surtout, le capitalisme mondial, dominé par l’uranium et les renouvelables, résiste au changement. Les réglementations internationales, lentes à évoluer, et la frilosité des investisseurs privés freinent l’adoption du thorium.
Pourtant, son potentiel reste immense. À moyen terme (2030-2050), il pourrait compléter le mix énergétique. Pour la France, revenir dans la course exigerait un sursaut :
  • Rôle de l’État : Des financements publics massifs, comme ceux des grands programmes nucléaires des années 1970, seraient nécessaires.
  • Partenariats : Collaborer avec l’Inde ou des entreprises américaines pourrait accélérer les progrès.
  • Volonté politique : Surmonter les réticences anti-nucléaires et les pressions des marchés pour imposer une vision à long terme.
 
Et nous, dans ce système ?
 
Le thorium nous oblige à questionner notre modèle de société. Le capitalisme, avec sa focalisation sur le court terme, est-il compatible avec les défis énergétiques de demain ? Pouvons-nous confier notre avenir à des marchés qui négligent les investissements publics au profit des dividendes ? La Chine, avec son approche dirigiste, nous montre qu’une alternative est possible.
 
Le thorium, sous nos pieds, attend. Mais sans une rupture avec la logique capitaliste dominante, il risque de rester une promesse inachevée.


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15 réactions à cet article    


  • nenecologue nenecologue 10 juin 15:29

    Le thorium est le combustible parfait pour les centrales nucléaires.

    MAIS :

    1 - Ca fait de l’énergie bon marché et la cabale n’en veut donc pas.(concurrence avec les énergies qu’ILS contrôlent)

    2 - Les militaires ne peuvent pas faire de bombes avec donc ils n’en veulent pas.

    1 + 2 = FIN DU GAME.


    • nenecologue nenecologue 10 juin 16:12

      @nenecologue
      3 - Les politiques écolo-bobo (financés par la cabale) ne veulent pas du nucléaire (quel que soit son degré de sureté) par dogmatisme.


    • Seth 10 juin 15:31

      Vachement facile à utiliser, le thorium.  smiley


      • chantecler chantecler 11 juin 08:07

        @Seth

        Salut !
        Sur wiki je pense beaucoup de renseignements sur le thorium qui complètent l’article :

        https://fr.wikipedia.org/wiki/Thorium


      • suispersonne 11 juin 18:56

        @chantecler
        Merki !


      • Matlemat Matlemat 10 juin 16:00

        Un réacteur au Thorium produit des éléments radioactifs à vie courte, c’est bien, mais à très haute activité, très compliqués à manipuler.

        Si ce n’est pas utilisé à grande échelle c’est qu’il y a des raisons.


        • Seth 10 juin 16:29

          @Matlemat

          L’utilisation et la manipulation du thorium sont très dangereuses.


        • suispersonne 10 juin 19:03

          @Matlemat
          Vous pouvez préciser ?


        • suispersonne 10 juin 19:03

          @Seth
          Vous pouvez préciser ?


        • Matlemat Matlemat 13 juin 14:15

          @Matlemat
          Le Protactinium 231, demie vie 32 760 ans, relativement « moyenne », a haute activité, émetteur de rayon gamma, est une particulièrement bonne saloperie.


        • Spartacus Lequidam Spartacus Lequidam 10 juin 18:25

          Le dernier chapitre est faux !

          L’auteur ne doit pas connaitre Elon Musk....

          Ni vivre dans l’UE. Cet enfer soviétique anti-capitaliste qu’il ignore.

          L’état est un monstre et plus il est collectivisé, plus il menace les grands projets industriels et capitalistique et empeche la concurence. L’UE est une des pires.

          Ce n’est pas un problème de capittalisme, mais au contraire d’un trop d’étatisme.

          En france il faut

          40 ans pour pas construire un aéroport même si les gens votent pour,

          30 ans pour pas construire une prison, 

          25 ans pour pas construire une retenue d’eau

          20 ans ppour pas construire une autoroute

          10 ans pour pas construire une usine de pain au chocolat

          Par contre pour restaurer Notre dame l’état c’est lui même affranchis de ses propres règles.

          Alors demander au sytème capitaliste de créer une centrale au Thorium il faudrait en France 100 ans pour obtenir les autorisations..

          Exemple de la Gigafactory Tesla en Allemagne :

          Elon Musk a dû commencer la construction avec des risques lourds «  à ses risques  », en attendant des mois des des autorisations du Land de Brandebourg.

          Il a compté que pour une simple usine il lui a fallut remplir 2 palettes de 22 000 pages car l’état n’acceptait pas les pages non imprimées.


          Les USA pays plus libre a la liberté d’entreprendre, on y trouve plusieurs constructeurs de fusées bien supérieurs a la Nasaet aux fusées Chinoises ou européennes. Ce qui démontre que le capitalisme peut construire gros et que le changement de société c’est pas reduire le capitalisme, mais au contraire le liberer des tyrannies lberticides de l’état cet enfer !


          • Goldo Du 11 juin 16:54

            @Spartacus Lequidam
            Ca doit pas être facile tous les jours quand on s’autopersuade de vivre dans une dictature, fut-elle soviétique.
            Vas donc vivre en, Corée du Nord quelques temps, tu verras que la vie ici y est plutôt douce. Et pas trop soviétique.


          • xana 11 juin 10:26

            Moi je trouve que cette source d’énergie devrait effectivement être utilisée, mais sous un contrôle très fort de l’Etat.

            C’est pourquoi j’ai nettement plus confiance en la Chine pour la développer, l’industrie en France (et en Occident en général) étant bien trop soumise aux impératifs de rentabilité à court terme.

            Non, les centrales nucléaires au Thorium ne sont pas pour nous !

            Tout au plus pourrions-nous en acheter une auprès de la Chine bien après sa mise au point... 


            • mmbbb 11 juin 14:27
              • Désengagement de l’État : À partir des années 1990, les gouvernements, sous pression des marchés et des mouvements anti-nucléaires ( merci les écolos !), ont réduit les financements pour la recherche nucléaire, privilégiant des solutions à court terme." 
              dans le chapitre La France : victime de la logique capitaliste

              les ecolos anti nucleaire sont a gauche de la gauche et ils ont rejoins la NUPES

              Contradictoire ! 

              La Chine est en train de mettre au point un reacteur de 4 eme générations 
              a haute température .

              Dans ce média nous avons l excellent Cabanel pour les éoliennes 

              Un ecolo pur et dure anti capitaliste mais il est tellement con qu il ne voit pas que certains parcs éoliens sont détenus par des fonds de pensions .



              • Philomo 11 juin 14:58

                <base href="https://www.agoravox.fr/">Je cite : « d’une société capitaliste qui peine à s’engager dans des projets nécessitant une intervention massive de l’État. »

                Non ! tout ce qui est demandé à l’état c’est un soutien politique, comme cela avait été le cas dans les années 70 . Et laisser le champ libre aux investisseurs et ingénieurs.

                Tout s’est gâté dans les années 90 quand les gouvernements ont décidé de casser le nucléaire français. Ce qui a été fait.

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