• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Tribune Libre > Le « dépeceur de Montréal » : Luka Rocco Magnotta, un monstre à l’ère (...)
#86 des Tendances

Le « dépeceur de Montréal » : Luka Rocco Magnotta, un monstre à l’ère du numérique

En mai 2012, Montréal bascule dans l’horreur. Un colis macabre, contenant une main humaine, arrive à Ottawa, adressé à un parti politique. Luka Rocco Magnotta, jeune homme au charme troublant et à l’âme obscure, vient de commettre un crime d’une barbarie inouïe, filmé et diffusé en ligne. Ce meurtre, minutieusement orchestré, devient un spectacle médiatique qui secoue le Canada et le monde. Comment un marginal en quête de gloire est-il devenu le "dépeceur de Montréal" ? Pourquoi ce fait divers continue-t-il de hanter les esprits ?

JPEG

 

Un marginal en quête de lumière

Luka Rocco Magnotta, né Eric Clinton Kirk Newman en 1982 à Scarborough, Ontario, grandit dans un foyer fracturé. Entre un père schizophrène et une mère autoritaire, son enfance est marquée par l’instabilité. Dès l’adolescence, il rêve de célébrité. Les archives d’une audition pour l’émission CoverGuy en 2007 montrent un jeune homme obsédé par son image : "Je veux être une star, peu importe le prix", écrit-il dans une lettre à un producteur, retrouvée dans les dossiers d’une chaîne torontoise. Cette ambition le pousse vers des milieux troubles : mannequinat éphémère, films pour adultes, et une présence en ligne où il se réinvente sous divers pseudonymes.

 

Regardez le casting de Luka Rocco Magnotta qui voulait faire de la  télé-réalité !

 

Avant le meurtre, Magnotta attire l’attention pour des actes de cruauté. En 2010, des vidéos montrant des chatons asphyxiés, postées anonymement sur YouTube, lui sont attribuées. Une pétition en ligne, archivée sur un forum de protection animale, dénonce : "Cet homme est un danger, il passera aux humains si on ne l’arrête pas". La police de Toronto, dans un rapport de 2011, note des signalements mais manque de preuves pour agir, une "occasion manquée" qui pèsera lourd. Magnotta, insaisissable, s’installe à Montréal en 2011, dans un appartement modeste au 5720 boulevard Décarie.

Dans ce quartier populaire, il passe inaperçu. Les voisins, interrogés par le Journal de Montréal en 2012, décrivent un homme discret, presque spectral, mais dont le regard "mettait mal à l’aise". Magnotta prépare son crime comme une performance : il achète des outils, installe une caméra, et choisit sa victime. Son appartement, avec ses murs défraîchis et son odeur de moquette humide, devient le décor d’une tragédie qui marquera l’histoire criminelle canadienne.

 

 

Le meurtre de Jun Lin : une mise en scène macabre

Le 24 mai 2012, Jun Lin, étudiant chinois de 33 ans à l’Université Concordia, rencontre Magnotta via un site de rencontres. Lin, décrit comme "sérieux et généreux" par un ami dans une lettre lue au procès, ignore qu’il entre dans un piège. Les détails du meurtre, tirés du rapport d’autopsie déposé en 2013 à la Cour supérieure du Québec, sont glaçants. Magnotta attire Lin dans son appartement, où il le drogue avec un sédatif, probablement du GHB, selon les analyses toxicologiques. Attaché à un lit, Lin est poignardé à plusieurs reprises avec un tournevis, un acte d’une violence méthodique. Magnotta démembre ensuite le corps, utilisant une scie et des couteaux de cuisine, et profane le cadavre dans des actes nécrophiles, filmés avec une précision glaçante.

 

Lin Jun: inquiétude parmi les étudiants chinois de Concordia | La Presse

 

La vidéo, intitulée 1 Lunatic 1 Ice Pick et diffusée sur un site underground, devient virale avant son retrait. Un courriel anonyme, archivé sur un forum en 2012, alerte : "Ce n’est pas une fiction, c’est un vrai meurtre". Magnotta ne se contente pas de tuer : il envoie des membres de Lin – une main, un pied – par la poste à des écoles de Vancouver et à des bureaux politiques à Ottawa, accompagnés de notes provocatrices, comme "Vous n’oublierez jamais ceci", retrouvée dans les archives policières. Le torse de Lin est découvert le 29 mai 2012 dans une poubelle près de l’appartement, enveloppé dans un sac-poubelle, sous l’odeur âcre des ordures estivales.

L’horreur secoue Montréal. Les journaux, comme La Presse, décrivent une ville "paralysée par la peur". Les proches de Lin, dans des témoignages judiciaires, pleurent un homme "plein de rêves", venu au Canada pour étudier l’ingénierie. La brutalité du crime, combinée à sa diffusion en ligne, transforme un meurtre en un événement médiatique sans précédent. Comme l’écrit un chroniqueur du Globe and Mail en 2012 : "Magnotta a fait d’un crime un spectacle et d’Internet son théâtre".

 

Luka Rocco Magnotta: Interpol vient en aide au SPVM | La Presse

 

La traque et la vie derrière les barreaux

Après le meurtre, Magnotta fuit Montréal, laissant des indices provocateurs : un passeport usagé, des billets d’avion, et des messages sur des forums. Les archives d’Interpol, consultées via les rapports de 2012, montrent une chasse à l’homme internationale. Il est repéré à Paris, puis arrêté le 4 juin 2012 dans un cybercafé de Berlin, lisant des articles sur lui-même. Un officier allemand note dans un rapport : "Il semblait savourer l’attention". Lors de son extradition au Canada, Magnotta reste impassible, un sourire énigmatique aux lèvres.

 

Photo postée dans l'album « Paris 2010 » sur la page myspace de Luka Rocco Magnotta, recherché par Interpol.

 

Condamné en décembre 2014 à la perpétuité pour meurtre au premier degré, Magnotta est d’abord incarcéré dans une prison de sécurité maximale à Port-Cartier, au Québec. En 2023, il est transféré dans une prison de sécurité moyenne, La Macaza, suscitant une controverse relayée par des articles de CTV News et des publications sur X : "Trudeau’s Bill C-83 has freed him from maximum security into a medium security prison where he enjoys more freedom", note un homme politique en 2024. En prison, Magnotta cherche encore l’attention. En 2015, il s’inscrit sur Canadian Inmates Connect, un site de rencontres pour détenus, décrivant son désir de trouver "un prince charmant".

En 2017, il épouse Anthony Jolin, un autre détenu condamné pour meurtre, lors d’une cérémonie discrète au pénitencier de Port-Cartier. Selon Montreal Gazette, le mariage, célébré le 26 juin, surprend par son cadre : une prison où les liens humains sont rares. Peu de détails filtrent sur leur relation, mais un article de Narcity en 2023 suggère que Magnotta maintient un profil bas, participant à des activités comme des cours ou des loisirs carcéraux, bien que les rumeurs d’un "style de vie confortable" soient invérifiables. Sa vie en prison, entre routine et quête d’attention, reflète son paradoxe : un homme qui, même derrière les barreaux, cherche à rester sous les projecteurs.

 

L’écho du crime et la question de la libération

Le crime de Magnotta résonne par son exploitation des médias numériques. En 2012, YouTube et Twitter, encore balbutiants, amplifient l’horreur. Un article du Toronto Star note : "Magnotta a compris l’ère numérique mieux que la police." La vidéo du meurtre, vue par des milliers avant son retrait, fait de lui un pionnier macabre du "crime viral". Le contraste entre Jun Lin, étudiant discret, et Magnotta, narcissique flamboyant, ajoute une dimension tragique. Une lettre d’un professeur de Concordia, publiée dans Le Devoir en 2012, déplore : "Jun voulait un avenir, pas une fin aussi cruelle".

La question de la libération de Magnotta est complexe. Condamné à la perpétuité avec une période de sûreté de 25 ans, il ne sera pas admissible à une libération conditionnelle avant 2039, à l’âge de 57 ans, selon les archives judiciaires de 2014. Même alors, la gravité du crime et sa notoriété rendent une libération improbable, bien que le Service correctionnel du Canada réévalue sa classification tous les deux ans. 

L’affaire Magnotta interroge la fascination pour les tueurs médiatiques, la responsabilité des plateformes en ligne et les limites des systèmes judiciaires face à des provocateurs modernes. Dans une société saturée d’images, il incarne un miroir dérangeant, reflétant nos obsessions pour la gloire et l’horreur. Comme l’écrit un chroniqueur de la BBC en 2012 : "C’est un crime local qui a hypnotisé le monde".


Moyenne des avis sur cet article :  1.38/5   (37 votes)




Réagissez à l'article

21 réactions à cet article    


  • Je veux répondre au modérateur courageux qui m’a envoyé ce commentaire lorsque cet article était proposé pour publication :

    22 mai 2025 à 11h37min

    Le « dépeceur de Montréal » : Luka Rocco Magnotta, un monstre à l’ère du numérique
    je me demande si vous jouissez en écrivant cela ... Montréal n’est pas Tourcoing, non ?

    Oui, je suis né à Tourcointg et j’en suis fier. A l’époque, c’était une ville où la vie était très agréablle, à l’époque où c’était une des capitales du textile. Aujourd’hui, comme beaucoup d’autres grandes villes, la situation est radicalement différente. Par contre, quel est le rapport entre Tourcoing et Montréal ? C’est certainement sensé me faire peur. C’est raté. De plus, cela fait près de 40 ans je ne suis pas retourné dans ma ville natale. Je vis toujours dans les Hauts-de-France, une région que j’aime beaucoup, mais plus dans le Nord. 

    Ta vie doit être bien triste pour que tu sois réduit à enquêter sur ma vie privée. J’ai de la pitié pour toi. J’ai fait valoir mon droit à l’oubli numérique mais je sais qu’Internet n’oublie rien. Il y a encore quelques traces de mon passé numérique, ici ou là. Mais je m’en moque. J’espère que cette « découverte »  ô combien importante pour l’humanité  t’a procuré une certaine jouissance. 

    Je sais sous quel pseudonyme tu écris régulièrement sur AgoraVox. Tu es un ancien coco qui regrette l’époque de Staline et de Pol Pot et qui ne s’en cache même pas. Tu es pathétique. Sans oublier que tu es également un lâche. Logique.


    • Désolé pour les fautes : « Oui, je suis né à Tourcointg et j’en suis fier. A l’époque, c’était une ville où la vie était très agréable, c’était une des capitales du textile ». 


    • Gégène Gégène 22 mai 16:06

      @Giuseppe di Bella di Santa Sofia

       ???


    • Pourquoi ces points d’interrogation, @Gégène ?


    • Gégène Gégène 22 mai 16:26

      Bonjour Giuseppe,

      Que viennent faire ici vos démêlés avec de tels fêlés du bocal ?
      Et pour les menaces de mort, il faut savoir que sur internet, hors cas
      particuliers, il n’est pas d’anonymat, mais seulement un pseudonymat.


    • Bonjour @Gégène,

      C’est un message que je voulais faire passer à cet individu, qui est un auteur prolifique sur AgoraVox. C’est un lâche qui fait passer un commentaire de ce genre dans la phase de modération, où même le pseudo n’est pas visible.

      Ici, il veut m’impressionner et me faire peur car il n’y a pas de menaces de mort explicites. Manque de bol, ça fait 40 ans que je n’ai pas mis les pieds à Tourcoing. J’ai été placé sous protection policicère, il y a plus d’une dizaine d’années, pendant plusieurs mois. Je sais qu’il n’existe pas d’anonymat sur Internet, sauf si la personne utilise un VPN. 

      Personnellement, ça ne me fait pas peur. J’ai déjà poursuivi plusieurs personnes en justice pour des faits de harcèlement, d’insultes, de menaces de mort, etc. La dernière fois, c’était en 2023. La personne a été condamnée à 2 000 euros de dommages-intérêts. Ils ont été reversés à une association de protection animale. Je n’accepte pas d’argent de ces gens-là.


    • adeline 22 mai 18:00

      @Giuseppe di Bella di Santa Sofia
      bon ya comme un blème... vous aviez expliqué être sicilien protestant vivant à tel aviv, tourcoing.... ça fait loin non ?


    • Gégène Gégène 22 mai 18:20

      @Giuseppe di Bella di Santa Sofia

      A ma connaissance, un VPN ne garantit pas l’anonymat.
      Je verrais plus sûrement Tor, surtout en utilisant Tails . . .


    • Seth 22 mai 15:59

      J’aurais préféré le japonais qui a bouffé sa meuf. Ce Luka est petit bras, c’est décevant.  smiley


      • Gégène Gégène 22 mai 16:02

        @Seth

        de là, l’expression « bouffer la chatte » smiley


      • Bonjour @Seth,

        Vous avez raison mais le Japonais cannibale  qui n’est plus en prison, il me semble  n’a pas bénéficié de l’écho international du crime odieux de Luka Rocco Magnotta. De plus, il s’agissait du premier meurtre diffusé sur Internet. 

        J’ai visionné la vidéo du meurtre de Jun Lin, à l’époque. Je regrette de l’avoir fait. 


      • Seth 22 mai 16:13

        @Gégène

        On n’a jamais précisé comment il l’avait cuisinée, certains ont tendance à penser que c’était du sashimi.  smiley


      • Gégène Gégène 22 mai 16:19

        @Giuseppe di Bella di Santa Sofia

        Pour les japonais, bouffer une néerlandaise est péché véniel . . .


      • Gégène Gégène 22 mai 16:00

        Je me souviens aussi de cet enfoiré de Christophe Barbier, avec son air de pas y toucher, qui s’était empressé de donner le nom du site hébergeant la fameuse vidéo.

        Sinon, au sujet des légendes d’illustrations, pourquoi ne pas les regrouper en fin d’article, dans le même ordre que dans l’article ? Même un lecteur stalinophobe devrait s’y retrouver smiley


        • Bonjour @Gégène,

          Je me souviens également de Christophe Barbier qui s’était empressé de donner le nom du site hébergeant cette vidéo particulièrement choquante. C’est à cause de lui que je me suis précipité sur mon PC pour la visionner. Je regrette vraiment de l’avoir fait.

          C’est une idée intéressante. Il faudrait mette les légendes en bas de l’article pour indiquer ce que les photos représentent. Merci pour cette idée.


        • juluch juluch 22 mai 20:53

          Un dingue à la puissance 10....

          libéré ?

          J’en doute, les juges Canadiens sont aussi sévère que leurs homologues des USA.....j’espère en tout cas.


          • V_Parlier V_Parlier 25 mai 20:08

            @juluch
            Non, le Canada c’est du même accabit que la France, dans 10-15 ans il est dehors.


          • ETTORE ETTORE 23 mai 12:13

            Sacrées étagères à collection de crassitudes, conservée dans le formol, que vous avez là, Guiseppe.. Vraiment

            Je me demande toujours, quel est votre système de repérage et d’ÉTHIQUE-t-âge que vous usez....

            Vous savez, à force de manipuler ces récipients, il se pourrait que les liquides contenus, perlent, et agissent sur la peau des mains, de façon à vous pénétrer, et transpirer en écriture, pour un cercle fermé, tel un athanor à combustion lente.


            • ricoxy ricoxy 23 mai 23:55

               

              Voir une vidéo sadique sur internet ? Ça rappelle la réponse cynique du ge Danfin des Plaideurs de Racine : :

               

               ISABELLE.
              Hé Monsieur, peut-on voir souffrir des malheureux ?

               DANDIN.
              Bon, cela fait toujours passer une heure, ou deux.

               


              • ricoxy ricoxy 23 mai 23:56

                rectif : juge Dandin et non Danfin
                 


              • Lonzine 24 mai 16:52

                Plus proche de nous et peu connu il y a la veuve weber

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON



Publicité



Les thématiques de l'article


Palmarès



Publicité