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Accueil du site > Tribune Libre > L’excès de politique tue la politique

L’excès de politique tue la politique

Une chose est assez surprenante, la multiplication des listes aux élections européennes. De quoi méditer sur un excès de politique induisant sans doute une impuissance du politique à régler des problèmes importants affectant la société.

Les élections européennes à la française ont montré une dispersion des listes à un point tel qu’on se demande si les impuissances du politique ne s’expliquent pas par un foisonnement de gens épris de quelques miettes de notoriété, gloire et pouvoir. La personnalisation de la politique est un phénomène récent mais bien cerné. La personnalisation, c’est autant la mise en scène et en intrigue des grandes figures que la monté en puissance de figurants de tous bords, prêts à défendre n’importe quelle cause, du moment qu’ils peuvent se la jouer en causant dans des petits cénacles, voire plus si affinité des médias et des masses. La politique serait-elle comme l’art, 10% d’inspiration et 90% de transpiration selon Picasso, autrement dit, la politique, 10% de choses sérieuses et le reste, des futilités, des postures, des caprices, des bavardages, des réunions et bien évidemment un peu de transpiration sous les projecteurs de 1000 watts mais bientôt, les projecteurs basse consommation feront leur apparition, ce qui n’empêchera pas les écolos de faire leur transpiration pour des lubies sur le réchauffement et le carbone.

La politique, c’est un moyen pour se donner une contenance. Quand on sait jouer d’un instrument, on monte un groupe, on se donne en spectacle, on séduit les nanas et même les groupies pour les plus doués. La politique a aussi à voir avec la séduction. C’était déjà le cas dans les réunions gauchistes des années 60. D’infâmes machos glosant sur le matérialisme dialectique. Rien n’a changé, sauf le style et les idéologies. Le pouvoir est un élément sexy. Comme la guitare. Quand on se sait pas jouer d’un instrument, on peut faire de la politique pour draguer qui on veut et accessoirement, défendre des idées mais qui dit que les idées sont défendables et non pas de simples lubies qui se présentent aucun intérêt contrairement aux lobbies qui représentent des intérêts et sont très influents autour des parlements, notamment celui de Strasbourg. Autant dire que la politique est une chose philosophique dont les contours bougent. Les lignes politiques bougent disent les commentateurs, en suivant ce qui se passe depuis 50 ans. Mitterrand fit bouger les lignes avec un support idéologique conséquent et légitime, après Giscard. Plus récemment, Tapie a futilement bougé les équilibres, à l’occasion des européennes de 1994 mais c’est Le Pen qui a créé le plus de tectonique ces années là. Puis, en 2007, Bayrou l’éphémère trublion a bougé aussi les lignes à la faveur d’un refus du duo Sarko Ségo, et en 2009, c’est Dany et les écologistes qui bougent les lignes sur fond de désamour envers Bayrou et le PS. La victoire des écologistes est une mauvaise chose pour la politique mais un titre de gloire pour le héraut du D-day de l’écologie, le Dany-day est advenu, sur fond de psychose climatique avec l’appui des propagandistes de l’écologisme. Mais l’essentiel, c’est de comprendre que si les lignes des équilibres politiciens bougent, c’est parce que le politique ne bouge pas et ne se repositionne pas dans son rapport avec la société. C’est le message que j’essaie de faire passer. Il y a une mal politique comme il y a une mal bouffe. C’est ce qui transparaît depuis des années et devient évident à l’occasion des européennes de 2009.

Le citoyen est quelque part dépossédé de ses droits à la création d’un espace républicain. Parce que la politique est confisquée par les lobbies et les lubies. Quand ce n’est pas l’intérêt d’un groupe industriel, c’est la défense de quelques taxes carbone qui est captée par l’action politique. Et le citoyen ne s’y retrouve pas et l’a bien compris en s’abstenant. Il manque de la philosophie et des grandes tendances sur les horizons de l’humanité. Alors la politique se joue en seconde division, avec le pragmatisme et la preuve et le tout secondé par les médias. Un vieux massacré chez lui et c’est Le Pen qui arrive au second tour le 21 avril 2002. Une planète filmée avec des commentaires mensongers et c’est Dany le Vert qui rivalise avec le PS sans avoir une réelle vision de l’humanité. La politique des années 60 est révolue. Maintenant, c’est le réactif et l’émotif. Le nationalisme de Le Pen n’avait rien d’un élan commun mais tout de la haine envers l’étranger. Une réaction face au dispositif de l’immigration historiquement déterminé par des besoins économiques du système capitaliste. L’écologie de 2009 est triste et autoritaire, une réaction artificiellement créé par les producteurs d’affects et de films de propagande. La politique se noie dans les intérêts économiques, les lubies idéologiques, les désirs de gloire et les ego narcissiques, les réactions émotives. Tous ces thèmes définissant des types et caractères d’hommes politiques, avec au final cette dispersion qui stérilise les grands enjeux. Le seul à tirer l’épingle du jeu étant Sarkozy dont la victoire sur l’adversaire se fait à la Pyrrhus. Les adversaires étant si peu consistants, si volatiles, si thématiques, qu’il est aisé de les enrôler dans la grande synthèse sarkozienne et bientôt un ministre vert pour compléter le tableau à la Borloo.

Au bout du compte, on se demande si ce n’est pas cet excès de politique qui nuit à la politique. Cette pratique de la politique qui cherche à englober la totalité des existences humaines, se mêlant de culture, de santé, de tas de choses que des citoyens éclairés, bien dans leur tête, déterminés, pourraient régler eux-mêmes avec sagesse et raisons. Mais les citoyens ne jouent pas le jeu de la République. En chaque citoyen règne un républicain honnête et un insupportable lobbyiste pour qui la politique doit défendre ses intérêts et satisfaire ses lubies. Le grand bouleversement, ce sera quand les hommes passeront du stade politique au stade spirituel et universel. A moins qu’ils ne puissent effectuer cette transition, auquel cas les sociétés du futur ressembleront de près au nazisme.


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5 réactions à cet article    


  • Céphale Céphale 10 juin 2009 15:00

    « Mort aux cons », avait dit Massu. « Vaste programme », avait répondu le général. Ce sont les cons et les connes voulant faire de la politique qui ont le plus de succès chez les cons et les connes.

    Dans mon bureau de vote, j’ai mis un certain temps à trouver le bulletin d’un grand parti pour lequel j’ai toujours voté. Il était perdu parmi une vingtaine de bulletins alignés sur la table. J’ai fait pourtant des études supérieures, alors comment voulez-vous que les électeurs du quartier pauvre de ma ville s’y retrouvent ? Résultat, dans mon bureau de vote : 150 voix UMP, 50 voix PS, 50 voix Europe-Ecologie et 200 abstentions. Les électeurs du quartier pauvre ne se sont pas déplacés, à la différence des bobos des beaux quartiers.


    • saint_sebastien saint_sebastien 10 juin 2009 15:34

      Une offre politique abondante est au contraire une bonne chose dans une démocratie.

      Je préfère cela au bipartisme.

      Cela donne du choix à l’électeur qui ne peut plus se réfugier dans le « tous pourris » pour rester chez soit à l’heure du vote.

      Ou alors la plupart ( 60% ? ) d’entre nous sommes tellement cons que dès qu’il faut choisir entre plus de 2 partis on arrive plus à raisonner ?
      A ce moment la je ne donne plus très cher de notre démocratie...

      L’histoire des bulletins de vote est une autre problème


      • Marc Viot idoine 10 juin 2009 16:48

        >L’écologie de 2009 est triste et autoritaire, une réaction artificiellement créé par les producteurs d’affects et de films de propagande.

        Je suis daccord avec vous sur l’existence d’un écran vert de fumée démagogique.

        Et évidemment, certains intellectuels ne peuvent qu’être déçus s’il n’y voit que poudre aux yeux et artifices habituels des outils d’asservissement.

        Je ne peux que vous engager à essayer de ne pas vous cantonner à votre première réaction de rejet et à vous demander si derrière cette fumée ne se cacherait pas un brasier beaucoup plus positif que ce que ne le pensez ...

        L’écologie est non seulement porteuse d’un sens aux ouvertures historiques mais elle est aussi riches de questions/solutions à tous les niveaux.

        Evidemment, comme tous les grands outils à travers les siècles, elle fait l’objet de multiples tentatives de récupération par ceux qui pensent l’utiliser comme un nouveau moyen d’assoir leur domination. Ils oublient simplement qu’à partir d’une certaine taille les systèmes que l’on pense controler génèrent leur propre mécanisme de défense envers les dépendance internes ...

        Le chaos ne laisse rien émerger par hazard, l’écologie ne fait pas exception à la règle.


        • HELIOS HELIOS 10 juin 2009 18:45

          A lire votre article, il me reste une amertume democratique au fond de la gorge.

          Au nom de l’efficacité politique vous cherchez a restaurer le « vote Utile ».
          A quand l’installation de Deux partis seulement ?

          Et la Politico-diversité, vous tous qui la defendez quand elle s’appelle « bio » , n’a t’elle pas droit de cité ?

          Et en poussant plus loin, pourquoi deux partis ? un seul st suffisant, il suffit simplement d’elire... non, pardon, dans ce cas cela s’appelle « nommer » celui qui nous defendra quand cela lui conviendra....

          S’il faut changer quelque chose, c’est bien le mode de scrutin, evidement, mais surtout pas le nombre de candidat a la defense de la chose publique.


          • Le chien qui danse 11 juin 2009 08:45

            Ce qui ressort, comme vous dites, c’est bien le fait que le fait politique est devenu une gesticulation autour de problèmes récurents et qui atteint la crédibilité des personnes prétendant les régler.
            Il est à constater que personne, apparemment, ne cherche à tirer profit du déficit politique et surtout la gauche qui n’a pas le courage de dénoncer avec plus de force un système qui fait du fait social une ripolinade et qui ai aussi le courage de sortir du TFP (travail, famille, patrie). A part quelques groupes dans le PS, comme Utopia qui essaie de lancer de nouveaux point de vue.
            Vous avez certainement raison, cette gesticulation est bien stérile en définitive et décourage l’élécteur plutôt que de le stimuler. Il y a du soucis à se faire, et c’est le pied du mur qui nous attend avec pour issue un sursaut ou la sclérose généralisée, peut-être la solution ne peut se trouver que là car nous sommes dans l’impasse ça devient évident.

            La (prétendue) diversité affichèe dans ses élections, permettant de discréditer l’abstention, rajoute encore au sentiment de vide politique dans lequel la démocratie s’enfonce étant donné qu’aucun problème de fond n’est réellement abordé, tout le monde lave plus blanc mais il n’y a plus de linge et l’eau est croupie.

            Nous avons besoin d’un autre monde, mais peut-être que c’est « aux hommes » et non plus « à des hommes » de le construire et là le politique renaîtra.

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