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Accueil du site > Tribune Libre > « Être Homme, c’est précisément être responsable » St-Exupéry

« Être Homme, c’est précisément être responsable » St-Exupéry

Comment changer d’ère dans un monde crispé sur ses modèles traditionnels et ses vieux réflexes de pouvoir, de management, de création ? Les élites (politiques, économiques, médiatiques) qui exerçaient jusqu’alors un pouvoir pyramidal semblent désemparées : cette expression démocratique les contraint de plus en plus à partager leurs pouvoirs et, jusqu’à présent, le pouvoir s’exerçait plutôt sans partage.

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Affiches FCE 2016

Le processus d’empowerment1 induit les notions d’autonomie, de responsabilité, de contrôle sur soi et de pouvoir. Mais il n’existe pas de pouvoir sans sa contrepartie, la responsabilité. En effet, pouvoir et responsabilité sont indissociables de l’empowerment  : les deux faces d’une même médaille.

Le phénomène d’empowerment est en train de prendre une réelle ampleur à l’ère numérique. Les individus ont pris conscience qu’ils détenaient collectivement des « super pouvoirs » décuplés par les réseaux sociaux et ils s’organisent en communautés pour alerter, mobiliser et faire réagir les foules. L’empowerment les incite aussi à davantage coopérer, s’organiser, s’engager, prendre leurs responsabilités, en même temps qu’ils (re)prennent le contrôle sur leur vie personnelle, professionnelle, sociale…

Il existe évidemment des barrières à cet empowerment. Comment changer d’ère dans un monde crispé sur ses modèles traditionnels et ses vieux réflexes de pouvoir, de management, de création ? Les élites (politiques, économiques, médiatiques) qui exerçaient jusqu’alors un pouvoir pyramidal semblent désemparées : cette expression démocratique les contraint de plus en plus à partager leurs pouvoirs et, jusqu’à présent, le pouvoir s’exerçait plutôt sans partage.

De nouveaux jeux de pouvoir à l’œuvre dans la société et l’entreprise

En dépit des résistances, les individus s’emparent des technologies existantes et bouleversent la société, les business models, la relation au travail, etc. Ces nouveaux jeux de pouvoir à l’œuvre dans la société et l’entreprise entraînent déjà de profonds changements des systèmes d’influence, plus de transparence et de contre-pouvoirs citoyens, de nouvelles capacités de savoirs et de diffusion des savoirs, de nouvelles possibilités d’exercer nos pouvoirs pour mieux contrôler les événements et relever les grands défis économiques, technologiques et sociétaux de la révolution numérique.

Se posent alors les questions de la désintermédiation sous toutes ses formes, d’une vraie démocratie participative, des leviers de pouvoirs dans un contexte où les grands lobbies, les politiques, les médias… tentent de résister. Même les plateformes de mise en relation se font « uberiser  » par les citoyens aujourd’hui ! Il est sain d’imaginer Uber ou Airbnb pris à leur propre piège…

Dans son livre L’urgence de la métamorphose (édition Des Idées & des Hommes, 2007) Jacques Robin, fondateur du Groupe des Dix qui a inspiré et donné son nom au Forum Changer d’Ère, appelait à une complète métamorphose de la société. Si l’ancien monde domine encore… ses jours sont comptés !

Il ne faut pas ignorer le côté sombre de l’empowerment et les effets pervers toujours possibles : les mouvements de foules sous le coup de l’émotion et les risques de manipulation massive, la tentation de capter, voire d’abuser de ses tout nouveaux pouvoirs… Ces grandes mutations nées du numérique, qui bouleversent les rapports de pouvoir, mais aussi nos vies personnelles et professionnelles, semblent parfois mettre le monde à l’envers. Pour certains, au contraire, c’est un monde qui retrouve enfin un peu de sens. C’est aussi une opportunité de transformation profonde et durable de notre société.

Certes, le sens de l’un est parfois le contre-sens de l’autre… Le bon sens face à un monde de carcans imposé par les politiques et les grands lobbies. Mais faisons confiance à notre tradition associative et coopérative, bref à la sagacité collective pour remettre un peu de bon sens dans ce monde à l’envers…

Parce que ce monde à l’envers qui émerge du chaos ambiant est bien plus censé, bien plus à l’endroit en réalité quand il donne le pouvoir au citoyen, tout en préservant l’intérêt général. Le monde à l’endroit, c’est aussi toute une jeunesse qui fait preuve d’une incroyable créativité et conserve foi en l’avenir. « La jeunesse est la seule génération raisonnable  » affirmait François Sagan. Je suis d’accord : laissons la jeunesse (les Millenials pour reprendre l’expression à la mode) décider de son futur et, au minimum, montrons-lui la voie de l’émancipation !

Prendre le contrôle sur sa vie

Cette déconnexion de nos élites, son incapacité à analyser les causes profondes de ce monde en transformation, contraignent les citoyens à « faire avec » en mutualisant les idées et les moyens pour imaginer, en marge des institutions, des solutions à des problèmes de plus en plus complexes.

Ce phénomène est mondial : une révolution silencieuse et pacifique est en marche. Des mouvements moteurs de changement positif émergent aux 4 coins de la planète. Sans attendre des directives venues « d’en haut », des individus lancent des initiatives qui profiteront à tous. Des millions de gens prennent leurs responsabilités. En changeant la société, ils se sentent responsables non seulement de leur avenir, mais de celui de toute la communauté. Ces « gens qui font » sont de plus en plus nombreux et appartiennent à toutes les générations.

En France, ces lieux d’innovation pour la pensée, dans ce contexte de changement de paradigme économique et sociétal, se nomment : Bleu, Blanc, Zèbre, Babyloan, Cap21, Change.org, Compte Nickel, Démocratie ouverte, Hackyourphd, HelloAsso, IFs, Kisskissbankbank, MakeSense, Ouishare, Place2B, SoScience, Women’Up, ZupdeCo… pour ne citer que ceux présents au Forum Changer d’Ère. La société collaborative -ou « l’ère du partage » comme aiment à l’appeler les médias- est en train de remettre à l’endroit ce monde qui semble avoir perdu le sens de l’essentiel, voire le sens tout court.

En faisant confiance à la dynamique citoyenne, à la société civile agissante au bénéfice de tous, cette révolution solidaire et positive touche peu à peu tous les pans de la société et les solutions imaginées par de simples citoyens, des élus, des associations, des entreprises sont transposables à d’autres domaines parce que le processus d’empowerment est contagieux, et parce que des leviers de changement positif existent partout, même dans les grandes organisations, même chez les politiques ! Oui, il existe aussi des bonnes volontés là où l’on ne s’y attendait pas. D’où l’importance de savoir les identifier. Parce qu’on ne peut construire que sur ce qui rassemble, ne nous focalisons pas sur ce qui divise.

Nous le voyons, la relation gouvernés-gouvernants est en train de changer : nos modèles, l’autorité, l’exercice de la démocratie… sont remis en cause. Comment faire en sorte que ce soit pour le meilleur ?

Dans le contexte actuel de crise et d’incertitude, d’un monde en accélération et en complète transformation, le Forum Changer d’Ère #4 a proposé une nouvelle journée de débats et d’échanges pour comprendre et construire ensemble le monde de demain. Chacun de nous peut, à son niveau, créer les conditions permettant de mobiliser à l’échelle de l’individu ou de la collectivité. Chacun peut contribuer à changer d’ère pour le meilleur en faisant sa part, en faisant sienne cette citation d’Antoine de Saint-Exupéry, que j’ai choisie pour illustrer cette 4e édition du Forum Changer d’Ère : « Être Homme, qu’est-ce que c’est ? Être Homme, c’est précisément être responsable. C’est sentir, en posant sa pierre, que l’on contribue à bâtir le monde. »

___________________________________

  1. Empowerment, que l’on peut traduire en français par autonomisation, et en québécois par capacitation ou empuissancement. « Empowerment* : partager le pouvoir à l’ère des émancipation réseaux sociaux  », tel était le thème de la 4ème édition du Forum Changer d’Ère qui s’est déroulé à la Cité des Sciences et de l’Industrie le 2 juin 2016.
  2. Tribune publiée dans La Revue du Cube n°10 de juin 2016.

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13 réactions à cet article    


  • Jason Jason 18 juin 2016 12:03

    Le pouvoir ne consiste le plus souvent qu’à vouloir imposer des comportements, et pire, des jugements que les autres appellent souvent de leurs voeux, acceptent par lâcheté ou confort, ou refusent plus ou moins radicalement. Le pouvoir bienveillant, lui, avance le plus souvent masqué.

    Les super-pouvoirs dont vous parlez à propos des réseaux sociaux ne donnent de responsabilités qu’à ceux qui se dévoilent. L’internet permet le plus parfait anonymat et a tendance au contraire à déresponsabiliser. Le nombre de fausses alertes, de propagandes, de faits tronqués et douteux y fleurissent.

    Mais, paradoxalement, c’est le foisonnement des avis, des proclamations, des vindictes qui ébranle les certitudes des gens de pouvoir. A preuve les gouvernements autoritaires ou tyranniques ferment les sites internet. De même qu’ils détestent cet autre pouvoir, le rire, la satire, la caricature (on en sait quelque chose en France).

    Je crois que l’empowerment dont vous parlez dégénère s’il n’est pas contrebalancé par un contre-pouvoir accepté par les décisionnaires. Que ce soit dans la société civile ou les gouvernements. Ce contre-pouvoir n’est le plus souvent que bailloné ou anesthésié par des promesses, paris sur les lendemains qui chantent.


    • gogoRat gogoRat 18 juin 2016 14:33

       les nouvelles générations seront-elles inspirées par ce que John Lennon nous avait déjà chanté ? :
      Avant de vouloir faire la révolution pour les autres, faites d’abord la révolution dans vos têtes.’ 


      • Taverne Taverne 18 juin 2016 17:34

        Le pouvoir n’existe pas.

        Il faut pas oublier qu’à l’état de nature, il n’y a pas de pouvoir ; il y a seulement des forces. Les gens de pouvoir n’ont aucun pouvoir ou plutôt ils n’ont qu’un seul pouvoir : celui d’employer les forces des individus contre eux-mêmes. Tout leur talent, toute leur éloquence, tournent autour de cette unique ambition. Le pouvoir d’utiliser la force des autres contre eux-mêmes a deux fins : l’intérêt général, mais aussi la satisfaction des intérêts particuliers. Le pouvoir serait la « civilisation » de la force.

        Dès lors que l’on a conscience de soi, il faut préserver et entretenir nos forces et notre autonomie par un pouvoir sur soi-même.

        A l’heure des leurres.

        On peut craindre que les dirigeants ne cèdent pas une once de leur pouvoir car ils aiment trop ça, qu’ils nous donnent simplement l’illusion de participer avec des concepts nouveaux qui font écran de fumée : la démocratie participative et autres lubies qui sont des leurres.


        • gimo 18 juin 2016 20:34

          @Taverne
           Vous etes plein de contradiction Le pouvoir n’existe pas apres On peut craindre que les dirigeants ne cèdent pas une once de leur pouvoir !!!!!!!!!!!!!!!!!!!


          Tout pouvoir des elus politiques est une conspiration permanente.Tout


        • Taverne Taverne 19 juin 2016 10:38

          @gimo

          Relisez bien : « à l’état de nature, il n’y a pas de pouvoir ». Sinon, est-ce que je suis plein de contradictions ? Oui, heureusement !


        • gimo 19 juin 2016 10:45

          @Taverne
           excuse my ....


        • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 19 juin 2016 16:33

          @Taverne

          Je serais assez de votre avis. Le pouvoir du collectif ou des masses c’est sympa, sauf que ceux qui l’ont conquis et le détiennent en influençant les représentations (les thinks tank c’est pas fait pour les chiens) et en les propageant par les médias, ne sont pas prêts en effet de le lâcher.
           
          Autrement dit, la soupe primitive 2.0 qui va nous faire changer d’ère évolutionnaire, elle est toute en entière dans un bocal que les puissants mettront à l’évier ou au feu dès qu’ils la jugeront dangereuse, cad, s’ils ne peuvent en prendre le contrôle.
           
          Comme les vieux l’ont toujours dit, pour former la jeunesse, rien ne vaut une bonne guerre. Pas besoin d’être conspirationniste pour observer que les néoconservateurs et l’OTAN font de leur mieux pour nous la préparer.
           
          Dans ces conditions, on peut toujours se dire que le pire n’est pas sûr, mais je me demande s’il n’y a pas de la méthode Coué bisounours à se raconter ainsi que les « puissances de ce monde » vont nous laisser créer un monde enchanté où tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil.
           
          Les révolutions agraires et technologiques n’ont cessé de se succéder depuis l’aube des temps, force est de constater qu’il n’y a, comme dit l’écclésiaste, « rien de nouveau sous le soleil » ; l’homme reste un loup pour l’homme.


        • chantecler chantecler 19 juin 2016 17:56

          @Luc-Laurent Salvador
          Oui, hélas !


        • Marc Chinal Marc Chinal 18 juin 2016 19:56

          @ l’auteur :
          pensez-vous qu’on puisse être « responsable » alors qu’on utilise un outil (la monnaie) qui intervient dans tous nos actes ou presque, et que cet outil est un outil de « déresponsabilisation » ?
          (grâce à la monnaie, quand on ne VEUT pas faire quelque chose, on paye quelqu’un pour le faire à notre place entrainant les violences, la corruption, etc).


          • EL Yagoubi M’hamed (---.---.181.3) 19 juin 2016 01:40

            le Forum Changer d’Ère #4 a proposé une nouvelle journée de débats et d’échanges pour comprendre et construire ensemble le monde de demain.

            Comprendre c’est agir. Ce sont des actions concrètes dans des situations concrètes qui sont génératrices des changements et non des débats dans des salles confortables et climatisées et des illusions sur les réseaux de communications. 


            • Marc Chinal Marc Chinal 19 juin 2016 10:04

              @EL Yagoubi M’hamed
              si on ne réfléchit pas avant, on brasse aussi du vent, non ?


            • Véronique Anger-de Friberg Véronique Anger-de Friberg 19 juin 2016 19:56

              @EL Yagoubi M’hamed : vous n ’étiez pas au FCE sinon vous auriez assisté à l’intervention de la jeune Alizée des MakeSense (qui font et aident ceux qui font) et aussi à la carte blanche à Bleu, Blanc, Zèbres ! qui agissent localement (mais il est vrai que les médias relaient peut les anonymes qui agissent et préfèrent parler de ceux qui parlent de ceux qui parlent...) et vous auriez appris bcp de choses sur les solutions qui fonctionnent ici et là en France et peuvent être transposées à divers domaines, que ce soit dans le social, l’éducation, l’économie, la politique, etc. Le compte Nickel est typiquement une invention BBZ et offre aux gens interdits bancaires et/ou sans domicile fixe de disposer d’une mastercard. Ca, c’est du concret. Il faut au moins suivre ce qui se dit/fait à FCE pour pouvoir en parler ensuite...

              @Ratatouille : vous avez dû partir dès le déjeuner alors, car l’aprem : de plus en plus de jeunes sur scène justement en plus des ateliers où les gens « font ». 


              • JC_Lavau JC_Lavau 1er juillet 2016 21:43

                Le franglais me donne des boutons.
                Les prêchi-prêchas en langue de bois aussi.

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