L’Université des ondes…

Le « Radiodidacte » reprend du service

Né dans un milieu simple et provincial, je me suis construit autour d'un poste de radio. Nourri à la sève des envolées du duo Bory Charensol le dimanche soir, à la curiosité savante d'un Jacques Chancel, au prosélytisme culturel d'une Pierre Bouteiller, au sens du conte et de l'ailleurs de Claude Villers, je suis un enfant de la radio.

Non, pas de n'importe quelle radio. D'une radio nationale, grand public, exigeante et soucieuse d'apporter la culture dans les maisons, de permettre à ceux qui le désiraient alors de s'ouvrir au monde, par le truchement d'une langue soignée, riche et respectée. J'ai grandi avec les histoires radiophoniques de Gérard Sire puis j'ai appris à mettre mon oreille en coin pour avoir un regard décalé, ironique, impertinent sur la société et ceux qui s'en pensaient dépositaires.

Je me suis fait mon université sur les grandes ondes. Tout était prétexte à écouter ce petit poste qui me suivait partout. À la pêche en bord de Loire où j'ai usé mes pantalons de jeunesse, en travaillant à mes devoirs que j'ai toujours effectués avec un accompagnement parlé, en me couchant de bonne heure pour partir en imagination avec les aventuriers des ondes.

Il y avait à l'époque matière à gourmandise intellectuelle. Il y avait surtout un profond respect du public et l'impossibilité de se perdre dans la démagogie, la stupidité, la facilité que d'autres ont choisi d'adopter quand la liberté a laissé la place à la médiocrité générale.

Enfant de la radio, je ne lui ai jamais été infidèle. J'ai parfois choisi d'autres antennes pour diversifier les approches et les aventures. France Culture m'a tendu les bras. Je ne conçois plus les informations ailleurs qu'en ce lieu qui est le dernier rempart au nivellement par la futilité. Point de résultats de sport ici qui se placent de façon indécente devant une famine ici, un coup d'état là-bas !

Participer à une aventure radiophonique resta longtemps un rêve inaccessible tant les radios locales se fermaient vite à l'idée de recevoir un individu à la langue trop bien pendue et aux propos incontrôlables. Il y eut bien quelques courageux animateurs pour m'inviter avec toujours cette obsession du temps imparti qui rendait impossible le développement d'un récit, d'une faribole ou d'un conte. Je ressortais toujours déçu du studio, conscient de n'avoir pas eu assez la parole.

Puis une proposition m'est venue de Guérande, une Web radio se créait autour du chant de marins et son Capitaine d'antenne osa ouvrir une plage à un parleur resté à terre. « À Contre-Courant ! » fut le tire de cette émission hebdomadaire d'une heure qui reçut un joli succès d'estime s'il est permis de croire aux statistiques d'audience. C'est ainsi qu'il y eut 189 enregistrements avant que l'antenne ne se taise définitivement pour des raisons indépendantes de notre volonté selon la formule consacrée.

Après une longue convalescence et un regain de vitalité, le Capitaine a retrouvé le sourire et le soleil tout en changeant de cap. Adieu les chants de marins qui l'avaient plongé dans une profonde tourmente prenant parfois des allures de tempête intérieure, il a accosté sur les rivages plus paisibles des mélodies de notre passé. La chanson française sera à l'honneur sur Soleil et Mélodies : la radio en se tournant vers les succès de 1930 à 1979, un choix qui laisse malgré tout la place à un palabreur des ondes.

C'est « À mots ouverts ! » que j'attaque cette nouvelle aventure, conscient de la difficulté à se faire entendre dans l'immense diversité des Web-radios. Faire entendre une voix qui parle lentement, qui articule, qui n'utilise aucun terme anglophone, qui raconte des histoires et dit de la poésie de mirliton, c'est une hérésie dans le contexte actuel dans laquelle je plonge tête la première.

L'émission passera le samedi de 17 heures à 18 heures sur Soleil et Mélodies : la radio avec un Capitaine Soleil à la console qui a retrouvé son envie d'oser l'impossible en m'offrant cette formidable opportunité. Faites nous le cadeau d'une petite visite et bien plus si affinité.