Soyons raisonnables...
... demandons l’impossible ! proclamait la jeunesse de Mai 68. Voilà un slogan que les citoyens français devraient reprendre à leur compte aujourd’hui, face à la crise des banlieues. Et maintenant, que faire ? s’interroge en effet le pays...
La stratégie de rétablissement de l’ordre de Nicolas Sarkozy et la proclamation de l’état d’urgence de Dominique de Villepin semblent commencer à porter leurs fruits. Lentement, les violences urbaines diminuent (bilan de la treizième nuit). Et l’espoir d’un retour au calme grandit.
Mais comment se comportera la classe politique française une fois l’orage - ou plutôt l’ouragan - éloigné ? Car, dans les quartiers défavorisés de France, derrière la racaille et les bandes, les délinquants et les mafias, il y a toute une jeunesse qui souffre silencieusement et attend patiemment, il y a une immense population, immigrée d’origine ou française de souche, en état de choc immédiat et de désespérance permanente.
Une fois l’urgence passée, la France des centres villes et des campagnes, ses élus et ses médias en tête, détournera-t-elle une fois de plus la tête ? Laissera-t-elle à nouveau le champ libre à la criminalité organisée, à l’islamisme et à l’extrémisme ? Attendra-t-elle, la tête enfouie dans son confort telle l’autruche, l’insurrection urbaine suivante ou la prochaine rébellion électorale ? Ou va-t-on, enfin, réagir avant la grande catastrophe annoncée ?
Il serait urgent que les médias, qui se sont désintéressés collectivement des quartiers pauvres depuis une dizaine d’années, prennent conscience qu’ils doivent relayer la parole de leurs habitants et raconter la réalité de ce qu’ils vivent au reste de la France. Y compris - mais pas seulement - quand les cités brûlent. Les Français, qui en savent plus actuellement sur les états d’âme des Irakiens que sur celui des banlieusards, ont d’avantage besoin de reportages sérieux que d’images chocs ! Aucun progrès ne sera possible si l’opinion, excédée par les violences, n’est pas mieux informée.
Mais la balle est avant tout dans le camp des représentants de la Nation. Une fois n’est pas coutume, le débat sur la crise des banlieues qui s’est tenu mardi à l’Assemblée nationale permet d’espérer. Pour peu qu’il ne soit pas, une fois de plus, sans lendemains. La proposition d’un élu en particulier vaut la peine d’être relevée, car elle constitue un préalable pour réinvestir financièrement dans les cités en ces temps de vaches maigres. C’est celle de Jean-Christophe Lagarde, député-maire UDF de Drancy (Seine-Saint-Denis). Il a proposé à tous les grands partis d’élaborer ensemble un pacte républicain pour les banlieues qui serait appliqué dans la durée "quelles que soient les alternances locales et nationales"... Du pur bon sens !
Apparemment, un plan tripartisan (UMP-UDF-PS) ne serait pas totalement irréalisable : Dominique de Villepin, premier ministre UMP, a reconnu que sa majorité avait eu tort de réduire notamment les subventions aux associations de quartiers, et il a décidé de les restaurer ; François Hollande, premier secrétaire du PS, a estimé qu’il fallait "cesser le petit jeu d’effacer ce qui a été engagé par les prédécesseurs" et que cela vaudrait pour la gauche quand elle reviendrait au pouvoir...
Un accord majorité-opposition pour le bien du pays ? Soyons réalistes, demandons (ce qui paraissait jusqu’à mardi) l’impossible !
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