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Leur vie est entre vos oreilles

 

Un monde impitoyable.

 

Jeu de rive

 

Il advint qu'une petite fille se prit d’affection pour les fourmis volantes. La chose peut paraître étrange même s’il faut bien le reconnaître, les chemins du cœur sont souvent énigmatiques. La belle enfant que ses parents avaient appelée Zoé, vouait pour toutes les créatures de la terre une affection sans borne. Elle passait ses journées, jumelles aux yeux, à observer la nature à proximité de chez elle et pour son plus grand bonheur, comme elle vivait en bord de Loire, elle n’avait de cesse de s’émerveiller chaque jour davantage.

Zoé avait appris lors de ses recherches que les fourmis volantes étaient munies d’ailes afin de pouvoir contribuer à la reproduction de la colonie en allant de par le vaste monde ligérien, trouver de nouveaux partenaires. Les mâles sont ainsi à la recherche d’une future reine pour donner naissance à une nouvelle colonie. Cette perspective enchantait l’enfant qui n'ignorait rien des lois naturelles de la procréation que trop de gens veulent taire à leurs rejetons.

Un jour qu’elle avait observé, non sans amusement les accouplements multiples d’une reine, gourmande tout autant que grande consommatrice de galants qui se brûlaient les ailes en un mortel ébat, elle vit avec effroi une ablette avaler d’une bouchée de la pauvrette qui avait pourtant constitué grand stock dans sa spermathèque.

En une bouchée, le petit poisson d’argent avait ruiné les efforts des sacrifiés et les espoirs de voir naître une nouvelle génération de fourmis. Zoé était à se désoler de cette malencontreuse rencontre quand elle vit surgir d’un nénuphar en fleur, une charmante grenouille qui venait elle aussi de percevoir la scène. L’enfant avait toujours aimé les grenouilles, elle n’était pas de ces néo ruraux indélicats qui se plaignent de la merveilleuse mélopée de nos amis les batraciens.

Elle en était là de ces réflexions quand elle vit plonger prestement la grenouille qui avait l’intention de manger la petite ablette. Si la pratique est exceptionnelle, elle n’en demeure pas impossible. La xénope lisse n’en est d’ailleurs pas à un forfait près. Redoutable prédateur invasif, venue clandestinement d’Afrique du Sud, elle fait des ravages dans la rivière.

Zoé était horrifiée. Voilà bien un animal qui modifiait considérablement le jugement qu’elle portait jusqu’alors pour les batraciens. Elle n’eut pas le temps de la vouer aux gémonies qu’un héron vint punir dans l’instant la méchante. D’un coup de bec fort habile, le bel échassier n’en fit qu’une becquée.

La petite fille, pour une fois se réjouissait d’être ainsi témoin d’une prédation. Elle appréciait beaucoup le héron, cet oiseau si malhabile quand il s’envole et si gracieux ensuite. Elle aimait par-dessus tout l’admirer quand il s’occupe de ses petits, tout en haut des peupliers, dans la héronnière.

Soudain, une flèche fondit sur l’animal, un autre oiseau, rapide comme l’éclair. Zoé poussa un hurlement d’effroi tant l’attaque avait été aussi soudaine que fatale. Un faucon pèlerin, espèce fort rare hélas, venait de briser la nuque de l’échassier dans un choc imparable. L’enfant était partagée entre l’admiration pour la vélocité incroyable de ce merveilleux rapace et l’émoi provoqué par la mort du héron.

 

Elle n’était pourtant pas au bout de ses émotions. Le faucon tout occupé à son festin ne vit pas jaillir sur lui une genette qui d’un coup de gueule lui fit son affaire. Le chasseur chassé, chacun venait de connaître le triste sort qu’il avait infligé à sa proie. Zoé, en bonne connaisseuse de la faune se dit que là était la loi immuable de la nature. Elle venait d’assister en peu de temps, à une chaîne alimentaire d’une incroyable diversité. Certes ce monde est impitoyable mais il en a été ainsi de toute éternité…

L’enfant n’eut pas le temps de philosopher plus longtemps. La chaîne fit apparaître le plus effroyable de ses acteurs. Des gamins, qu’elle connaissait d’ailleurs pour tous les forfaits qu’ils accomplissaient à l’école comme à la ville, se firent un malin plaisir de tuer ce merveilleux mammifère. Contrairement à ce qui s’était déroulé jusqu’alors, les gamins mirent dans leur meurtre toute la perversité dont seul l’humain est capable.

 

À distance, ils actionnèrent un piège qu’ils avaient installé là. Ils étaient en poste et voyant le succès de leur plan, ils approchèrent pour se saisir de l’animal pris entravé par un collet. La pauvre bête de débattait tandis que ses bourreaux la pendirent par la queue à un arbre avant que de l’achever par une effroyable lapidation.

Zoé en larmes, avait été incapable de réagir. Sidérée par l’atrocité de la scène, elle ne sut comment intervenir. Le pouvait-elle au juste ? Elle était de l’autre côté de la rivière, la distance et sa jeunesse la rendaient totalement impuissante. Elle maudissait ces maudits garnements mais que faire face au sadisme de ces méchants diables ?

Soudain, l’attention de la gamine fut attirée par un mouvement dans les fourrés proches d’elle. Quelque chose apparut, un petit personnage dont jusqu’alors, elle avait toujours refusé de croire en son existence. Un farfadet lui fit un geste amical, retirant son étrange chapeau pointu avant que de lui adresser la parole dans un français parfait dénué de tout anglicisme.

« Bonjour mon enfant. Tes larmes m’ont ému. J’ai assisté tout comme toi, à ce qu’on pourrait appeler la grande chaîne de la vie si ce n’était le dernier acte de ce drame. Que puis-je pour toi pour t’être agréable ? Je dispose comme tu dois le savoir, de pouvoirs magiques qui m’ont été accordés par mon gentil parrain, le mage Merlin ».

Zoé, revenue de son étonnement, répondit tout naturellement à cet être minuscule qui semblait surgir d’un conte de fées. Elle avait tant observé dans la nature que rien désormais ne pouvait la surprendre. Elle savait que tout était possible pourvu qu’on y mette tout son cœur. Elle demanda tout naturellement au personnage sorti de son imaginaire de redonner vie à tous les animaux qui venaient de la perdre sous ses yeux.

Le farfadet lui répondit avec un grand sourire : « Je ne suis pas surpris de ta requête. Je te reconnais bien là moi qui t’observe depuis très longtemps sans que tu ne t’en sois aperçue jusqu’alors. Je ne doute pas de ta sincérité mais pour te satisfaire, il convient que ce soit ceux qui ont assisté à ton récit de décliner dans l’ordre tous les acteurs de cette tragédie du quotidien ! »

Ainsi donc c’est à vous, chers lecteurs ou bien auditeurs de restituer la grande chaîne de la vie et de la mort qui vient de vous être narrée pour peu que vous nous ayez prêté attention. Nous ne vous demandons pas de nommer exactement chaque acteur mais bien de le restituer dans son espèce et son ordre d’entrée sur scène. Si vous n’y parvenez pas, je crains que vous soyez complices de ces jeunes canailles d’une férocité gratuite qui n’appartient qu’aux humains.

 

À vous de jouer, c’est de vous que dépend le retour à la vie de ces malheureux animaux. Ils sont au nombre de six. Je vous demande de répondre dans l’instant. Vous avez leur vie en vos mains.

1 _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

2 _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

3 _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

4_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

5 _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

6 _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

Bravo à vous, ils peuvent reprendre leur ronde même s’il y a de fortes chances que pour certains ce ne soit pas pour longtemps. Quant aux méchants gamins, contre eux, il n’est hélas rien à faire. Ils ne méritent même pas d’être morigénés. Ils n’en valent pas la peine.

 


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18 réactions à cet article    


  • Brutus S. Lampion 24 janvier 11:33

    J’ai eu tout bon !

    Alors, si j’ai bien compris, les poulets rôtis que cuisinait ma mère avaient mangé les vers qui avaient mangé Mamie au cimetière. Donc, c’est grâce à elle que j’ai grandi et du coup, contrairement à ce que j’avais prévu, je ne me ferai pas incinérer pour ne pas rompre la chaîne alimentaire.

    Je vais donc de ce pas changer mes directives anticipées.


    • C'est Nabum C’est Nabum 24 janvier 12:29

      @S. Lampion

      Quel sens du sacrifice
      Bravo


    • Jean Keim Jean Keim 24 janvier 20:48

      @S. Lampion

      Quand c’est la fin des haricots, ne pas confondre les vers et les asticots.


    • C'est Nabum C’est Nabum 24 janvier 21:24

      @Jean Keim

      Vous me tendez l’hameçon 


    • juluch juluch 24 janvier 12:05

      Gagné !

      chacun dans la nature y retrouve son compte....la nature est ainsi faite !!

      Sauf ceux qui tuent par plaisirs.


      • C'est Nabum C’est Nabum 24 janvier 12:30

        @juluch

        Exactement
        La morale est là


      • sylviadandrieux 24 janvier 18:04

        La chaîne alimentaire exige le sacrifice. Quant aux voyous ils méritent un bon coup de pied aux fesses. 

        Je ne suis pas insensible à la mort de ces petites bêtes mais ces petites bêtes chacune à leur tour doit manger aussi. Il n’y a que dans les jolis contes où les petites bêtes ne doivent pas être mangées. 


        • C'est Nabum C’est Nabum 24 janvier 18:55

          @sylviadandrieux

          J’ai essayé d’en faire un


        • sylviadandrieux 24 janvier 19:32

          @C’est Nabum
          En lisant la réponse au milieu des autres commentaires, je suis venue à me demander ce que vous aviez essayé de faire. 
          Même dans les contes je reste cartésienne pragmatique je ne peux m’empêcher de réfléchir et de rechercher la réalité. J’analyse les films les séries les histoires que je regarde. J’ai oublié mes contes d’enfant car le loup mange toujours l’agneau. 
          Décortiquer les contes une occupation intéressante. 


        • C'est Nabum C’est Nabum 24 janvier 19:52

          @sylviadandrieux

          J’ai donc échoué

          C’est toujours le cas avec vous


        • sylviadandrieux 24 janvier 19:59

          @C’est Nabum
          Mais j’ignore en réalité ce que vous voulez. Il y a un adage mais je ne peux l’écrire. 


        • C'est Nabum C’est Nabum 24 janvier 20:48

          @sylviadandrieux

          L’adage n’est plus de mon âge


        • sylviadandrieux 25 janvier 19:45

          @C’est Nabum
          C’est la faute de mon clavier. Il est n’en fait qu’à sa tête.  


        • C'est Nabum C’est Nabum 25 janvier 19:49

          @sylviadandrieux

          Je devrais m’entendre avec votre clavier


        • Jean Keim Jean Keim 26 janvier 07:34

          Manifestement quelqu’un ne vous aime pas *••

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