Propositions pour l’emploi de Nicolas Sarkozy : le vide sidéral !
Le sujet du chômage, de la création d’emploi, devrait être le thème essentiel de la campagne. Malheureusement, les sujets de diversion fleurissent et l'emploi est insuffisamment traité par la presse et par les médias.Que proposent les candidats et sont-ils crédibles ? Commençons par le candidat sortant, Nicolas Sarkozy.
Selon Nicolas Sarkozy (voir sa lettre aux Français), c’est la dévalorisation du travail et de l’effort, la diminution du temps de travail (les 35 heures), la tentation de l’assistanat, la préférence pour des allocations et des subventions plutôt qu’une reprise effective du travail, ainsi que l’inadaptation des formations au besoin du marché du travail (seuls 10% des chômeurs suivent une formation, 500 000 offres d’emplois non pourvues) qui expliquent en partie la hausse du chômage. C’est aussi une baisse de la compétitivité relative de nos entreprises, comparée à nos voisins européens notamment allemands, à cause d’un coût du travail trop élevé, qui explique la dégradation de notre balance commerciale (baisse des exportations et hausse des importations), et serait la cause de fermetures d’entreprises et de destruction de nos emplois.
Nicolas Sarkozy propose donc essentiellement les mesures suivantes :
- TVA sociale : report du coût des allocations familiales surla TVA(+1,6 point, passant de 19,6% à 21,2% en baissant en échange d’autant les charges sociales des entreprises, en vue de baisser le prix à l’exportation et de renchérir relativement les importations ;
- Suppression de la prime pour l’emploi avec un allégement des charges sur bas salaires, compensée par une hausse des bas salaires ;
- Obligation pour les chômeurs de longue durée de suivre une formation qualifiante et d’accepter une offre d’emploi correspondant à cette formation. Ce sujet pourra être tranché par référendum ;
- Extension du travail le dimanche, pour booster la consommation ;
- Exonération de charges sociales pour l’embauche de chômeurs de plus de 55 ans qui obtiennent un CDI ou un CDD de plus de six mois
- Accords compétitivité-emploi au sein des entreprises pour décider de la durée du travail ;
On peut s’interroger sur l’efficacité de ses mesures sur l’emploi :
- L’argument visant le coût du travail en France, qui pénaliserait la compétitivité des entreprises françaises, ne tient pas : le coût du travail n’est pas plus élevé en France qu’en Allemagne, en Suisse, en Belgique, en Italie, dans les pays nordiques, qui ont à notre égard une balance commerciale excédentaire. Lorsque Nicolas Sarkozy utilise la comparaison des charges patronales avec l’Allemagne, c’est trompeur. Comme je l’ai expliqué dans un article précédent, il est vrai que globalement les charges patronales sont deux fois moins élevées en Allemagne qu'en France mais en revanche les charges salariales sont deux fois plus élevées en Allemagne qu'en France, car le salarié prend plus à sa charge sa protection sociale, mais en contrepartie il a un salaire net plus élevé qu'en France. De même que les impôts sont deux fois plus élevés en Allemagne qu'en France. Les salaires bruts avant prélèvement sociaux et fiscaux sont donc plus élevés en Allemagne qu'en France (+34%). Ce sont ces salaires bruts qu'il faut considérer pour considérer le "coût du travail" pour l'entreprise, et non simplement les charges patronales comme l'a fait Nicolas Sarkozy. De plus, le coût du logement étant 2 à 3 fois moins élevé en Allemagne comparé à la France, le niveau de vie moyen est plus élevé en Allemagne. C’est aussi ce qui explique que malgré une plus grande précarité de l’emploi en Allemagne et les plus bas salaires à 6 euros nets de l’heure contre 9 en France, les plus bas salaires arrivent à un niveau de vie équivalent.
- Le niveau proposé de TVA sociale est trop faible pour être efficace. Environ 25% des biens importés et exportés sont constitués de coût du travail, donc 1,6% n’aurait qu’un impact de 0,4%. Il faudrait une hausse de TVA d’au moins 6% pour qu’il y ait un effet positif. De plus seulement 25% de l’économie touchée par cette mesure générale est concernée par les échanges commerciaux extérieurs, car elle s’applique aussi à tous les services, aux banques, à l’économie locale. En revanche l’impact négatif sur le pouvoir d’achat n’est pas neutre : les prix à la consommation augmenteront de 1,6%.
- Le raisonnement consistant à faire croire qu’il suffit de former les chômeurs (2,9 millions en catégorie A, 4,3 toutes catégories dont 1,8 inscrits depuis plus d’un an[1]) afin qu’ils puissent répondre aux offres d’emplois non pourvues (500 000), est fallacieux, ne pourrait s'appliquer qu'à peu de cas. Ce qu’il faut, c’est créer de nouveaux emplois pour remplacer les emplois supprimés. D'une part le chiffre de 500 000 offres vacantes n'est pas bon comme l’explique cet article, d'autre part les offres vacantes sont très majoritairement sur des postes non qualifiés qui n'entreraient pas dans ce cursus de formation : métiers de services aux particuliers comme serveur, animateur socioculturel, apprenti de cuisine et aide à domicile. Voir le rapport 2011 de Pôle Emploi sur les offres non pourvues, notamment pages 25-26, et son enquête sur les besoins de main d'œuvre.
- L’ouverture des magasins le dimanche ne fera pas plus consommer car à revenus égaux, les consommateurs dépenseront plus le dimanche en dépensant moins un autre jour. Au final cela déstabilise la vie de famille des travailleurs du dimanche.
Il n'y a rien dans ces mesures qui puisse véritablement créer de l'emploi, redynamiser l'économie, nos PME, ...
Je suis sidérée par le vide sidéral !
[1] http://www.travail-emploi-sante.gouv.fr/etudes-recherche-statistiques-de,76/statistiques,78/chomage,79/les-indicateurs-conjoncturels,264/la-derniere-publication-mensuelle,12768.html
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