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Commentaire de Christian Labrune

sur Erdogan : tyran ou despote éclairé ?


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Christian Labrune Christian Labrune 30 janvier 2018 09:38

@Marius
Les exemples de l’Irak et de la Lybie montrent bien que, quand bien même on pourrait souhaite la démocratie pour certains pays qui ne la connaissent pas, on ne peut pas l’imposer de l’extérieur sans risquer de tout foutre en l’air, surtout quand, à mi-chemin du processus, comme l’avait fait Obama en Irak, on retire les troupes d’un pays qui est encore loin d’être pacifié.

Il y aurait beaucoup à dire sur le cas de l’Egypte : la dictature de Morsi avait créé une situation bien pire que celle du régime précédent : on allait tout droit vers la république islamique. Il fallait donc à tout prix soutenir le coup d’état d’Al-Sissi qui, sans rétablir la démocratie (la police égyptienne ne fait pas dans la dentelle) donnait un coup d’arrêt aux exactions des islamistes. Au lieu de cela, durant plusieurs années, les aides économiques des Etats-Unis auront été partiellement suspendues, obligeant le régime à trouver d’autres soutiens, particulièrement du côté de l’Arabie et des Russes, ce qui n’était pas une évolution souhaitable.

 Je trouve très drôle que sur AgoraVox un grand nombre de décérébrés admirent Poutine qui est assurément un dictateur, et puissent en même temps ne pas voir que le régime actuel en Egypte est une « démocrature » du même type. Or, la démocratie, dans un pays comme la Russie, serait probablement possible : les opposants actuels s’en réclament et la plupart sont très hostiles à toute forme de totalitarisme. Ils ne sont évidemment pas des religieux fanatiques et ne visent pas une forme de dictature d’une autre sorte.

En Egypte, il y a bien une opposition libérale qui peut légitimement se plaindre d’un autoritarisme d’état qu’elle subit, mais il me semble qu’elle ne représenterait pas grand chose en face des islamistes dans le cas d’élections tout à fait libres. La plupart des articles d’un auteur comme el-Aswany, à la fin de l’ère Moubarak, se terminaient par cette formule : « la solution, c’est la démocratie », retournant le slogan bien connu des Frères musulmans : « la solution, c’est l’islam ». Or, la démocratie en Egypte aura produit sans délai l’islam le plus fanatique, et tout le monde se souvient que le pauvre el-Aswany, donnant une conférence à l’Institut du Monde arabe à Paris après les événements de la place Tahrir, avait failli se faire écharper par un public composé quasi exclusivement de Frères musulmans. Il avait fallu l’exfiltrer d’urgence par une porte dérobée.Le régime d’al-Sissi, qui ne l’enchantait certes pas, lui apparaissait alors comme un moindre mal. Je ne sais pas où il en est aujourd’hui. A la même époque, al-Sissi posait qu’il n’y aurait pas de démocratie possible en Egypte avant vingt ans. C’est plutôt désespérant, mais il serait difficile d’affirmer le contraire.

On peut très bien comparer la dictature d’Ergogan avec celle de Morsi, mais pas avec celle d’al-Sissi, laquelle n’est pas islamiste et s’efforce tant bien que mal d’empêcher les exactions contre les Coptes et de contenir le terrorisme en provenance de la bande de Gaza ou du Sinaï. Si le régime autoritaire actuel de l’Egypte tombait, c’est toute la région qui s’enfoncerait dans le chaos, et ce serait la renaissance immédiate du Califat.


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