Villes et migrations internationales : comment utiliser l’immigration pour le développement économique croisé
La question de l’immigration est au cœur de l’actualité. Nous la vivons au quotidien à travers nos villes et nos cités, ainsi qu’à travers les médias qui mettent en exergue les tristes événements qui, notamment dans la mer méditerranée, endeuillent nombres de nos familles africaines et autres, par le fait de la disparition tragique des candidats à l’immigration. Il n’y a pas si longtemps, la mise en lumière des pratiques esclavagistes qui ont cours en Lybie, et ailleurs, rappelle à tous l’obligation que nous avons de trouver des solutions urgentes pour éliminer les causes qui en sont à l’origine et nous orienter vers des initiatives qui contribuent à gérer ces flux qui peuvent être mieux utilisés au bénéfice du développement de nos villes et de nos Etats.
Cette actualité, c’est aussi ceux qui, pour raison diverses sont obligés de quitter leurs milieux, à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, par la force des choses, qu’elles soient étatiques ou non, liées à des catastrophes naturelles ou à l’insécurité dans leurs environnements respectifs. De manière générale, on retrouve toujours la recherche de la sécurité, du mieux être comme mobiles qui justifient que des personnes se déplacent pour chercher à vivre ailleurs loin de leurs milieux d’origine.
Si ont peut mettre en épingle le mouvement migratoire du sud vers le nord, c’est à dire des pays à faibles revenus vers les pays industrialisés et à un niveau de vie bien meilleur que dans les pays du sud, il faut également prendre en compte les mouvements du nord vers le sud, notamment avec la coopération au développement et les mouvements des expatriés qui ont choisi de vivre dans nos villes pour des raisons diverses. Il nous parait donc utile de prendre également en compte le mouvement migratoire du sud vers le sud, ainsi que les mouvements interrégionaux.
Nos villes francophones et nos centres urbains peuvent être confrontées à une immigration de main d’œuvre (provisoire) ou à une immigration familiale (définitive). Les pouvoirs publics sont dans l’obligation d’y apporter des solutions et d’œuvrer à la maitrise des flux entrants, incluant dans leur politique d’immigration des mesures visant une meilleure intégration des étrangers.
De manière pratique il importe donc aux responsables municipaux de structurer la récolte de l’information sur les questions de l’immigration par la mise en place d’un réseau de point de captage de l’information au niveau de chaque municipalité, tant au niveau urbain que communale. Ceci en créant, s’ils n’en existent pas, des bureaux urbains et communaux de l’immigration. Et s’ils en existent, en renforçant leurs capacités à identifier et à suivre les mouvements des populations. Notamment par la localisation, l’identification et le profilage des personnes concernées. Ensuite, par l’orientation de toutes les informations récoltées vers un centre commun de stockage. Ceci aurait pour avantage de permettre à l’autorité municipale de connaitre leurs besoins et de les orienter vers les structures qui peuvent apporter des solutions en termes de logements, d’emploi, de sécurité sociale, etc., Toutes les informations récoltées iront alimenter une banque de données conjointe entre villes francophones de telle sorte que, avec un tel outil les solutions qui auront été trouvées dans une ville, puissent servir de modèle ou de référence à une autre ville, par le partage des expériences et des informations.
Normalement, la plupart des villes, si pas toutes, devraient avoir un plan de développement et un plan d’amélioration de l’environnement qui nécessitent des ressources de toutes natures, dont les ressources humaines. Il est donc possible de trouver au sein de cette population immigrée les ressources recherchées, en fonction des énormes besoins de nos villes sans cesse en expansion. Concrètement, on pourrait envisager au sein de l’Organisation Internationale de la Francophonie, OIF, la création d’un « Haut Conseil Francophone de l’Immigration et de l’Intégration » qui aurait comme finalité d’harmoniser les politiques d’immigration des villes francophones.
Eneffet, certaines analyses soulignent la nécessité économique pour certains pays de recourir à une immigration sélective (sous la forme de quotas par exemple) afin de faire face au vieillissement de la population et de pourvoir en main d’œuvre qualifiée certains domaines d’activité. Cette harmonisation aurait l’avantage de passer d’une immigration subie à une immigration choisie via un processus de sélection de la main d’œuvre. Si elle ne s’éloigne pas de l’approche utilitariste et pragmatique qui caractérise traditionnellement les politiques d’immigration, cette stratégie pourrait se heurter à de nombreuses difficultés. Outre les critiques qui peuvent être émises sur le plan des droits de l’homme, cette politique doit s’accompagner d’une réelle volonté à l’échelle internationale de diminuer les pressions migratoires non seulement par la lutte contre l’immigration irrégulière mais aussi par le renforcement des aides au développement en faveur des pays d’émigration.
Elle pourrait, en outre, faire craindre une « fuite des cerveaux » venant encore davantage compromettre le développement de certains pays. Voilà pourquoi il nous parait utile d’envisager, à travers cette harmonisation des politiques, des programmes de mobilités des ressources, sans pertes d’avantages entre les villes francophones. Dans un contexte marqué par la pression de l’immigration clandestine, des formes de coopération entre les pays source de l’immigration et les pays d’accueil devraient se mettre en place ou être renforcée là où elles existent pour créer des conditions qui fixent les gens dans leurs pays d’origines ou qui les aident à retourner chez eux, après un séjour plus ou moins long à l’étranger. Les politiques d’immigration choisie prendront des formes différentes suivant les pays, en fonction de leurs besoins et de leur niveau de croissance.
Le rôle des médias :
Les références culturelles déterminent notre identité et la manière dont nous construisons la réalité ; elles influent sur notre perception de nous-mêmes, sur la manière dont nous rencontrons l'autre et sur les modalités de notre interaction avec le monde. Les médias exercent une grande influence non seulement sur ce que nous pensons mais également sur la manière dont nous agissons. La mondialisation n'est pas seulement un processus économique et technologique. L'interaction accrue entre les peuples, la libre circulation de l'information et l'interdépendance culturelle sont aussi des conséquences de cette mondialisation. Communiquer par-delà les différences culturelles est l'un des défis cruciaux du monde contemporain. Les médias ont dès lors un véritable rôle de médiation à jouer sensibiliser, pour informer, pour encourager une prise de conscience mondiale sur les défis de l’immigration, en amont dans les pays d’origines, comme en aval dans les pays de destinations. Une réalité dont il faut tenir compte, c’est que certaines populations font face à des situations économiques si désespérées que le périple tragique de l’immigrant est parfois encore considéré comme préférable à leur situation personnelle. Aussi seul le développement des pays est apte à apporter une solution durable. C’est pour cette raison que les villes francophones devraient collaborer, notamment à travers le mécanisme de jumelage pour travailler ensemble à la résolution des problèmes communs et que les riches aident les moins riches à se développer en échange de la maîtrise de l’immigration
Ce Haut Conseil Francophone de l’Immigration et de l’Intégration servira de centre d’impulsion des solutions aux problèmes d’immigration auxquels les villes francophones doivent faire face et aidera ainsi les gouvernements nationaux à mieux maitriser les flux migratoires pour le bien commun et le développement de nos Etats.
L’immigration ne doit pas être conçue seulement en termes nationaux au risque de ne pas être efficace. Elle doit être gérée à un niveau supranational pour plus de cohérence. Les questions d’immigration et de développement sont des problématiques qui doivent être pensées sur le long terme. L’immigration doit être pensée de manière tempérée et il faut rester conscient que le développement ne se fera pas en un jour. Même si certains pays adoptent des positions qui prennent en comptent la complexité du phénomène, son ampleur impose que ces questions soient traitées au niveau international, nécessitant ainsi des adaptations exigeantes du système institutionnel de l’Organisation Internationale de la Francophonie. (OIF)
La coopération entre les villes francophones doit avoir pour finalité de renforcer les capacités des gouvernements pour maximiser les possibilités socioéconomiques en adoptant des politiques migratoires davantage orientées sur le développement ; s’attaquer aux causes profondes de la migration économique, y compris les effets de la dégradation de l’environnement, en promouvant le développement communautaire et en renforçant la capacité des gouvernements à cibler les mesures de développement de manière plus stratégique ; mettre en œuvre des initiatives visant à mobiliser les compétences et les ressources financières des communautés africaines expatriées aux fins d’investissement et de développement sur le continent africain, dans toute la mesure du possible en étroite collaboration avec les pays hôtes ; soutenir le développement national ou les efforts de redressement et de reconstruction dans les pays en développement, dans ceux dont l’économie est en transition ou qui émergent d’une situation de conflit, en favorisant le retour et la réinsertion socioéconomique des nationaux compétents et qualifies résidant à l’étranger ; et faciliter l’élaboration de politiques et de mécanismes permettant d’améliorer les services de transfert de fonds des migrants, et, ce faisant, de renforcer les incidences des rapatriements de fonds sur le développement.
La constitution d’une élite immigrée investissant divers espaces économiques dans les pays d’accueil est un atout pour les pays d’origine. Il est évident que l'attachement affectif et culturel de cette élite n’est pas suffisant. Il faut donc chercher à l’appuyer par des incitations d'ordre économique et à créer un environnement adéquat pour l'investissement. Cela suppose une révision par les diverses institutions de la perception du rôle actuel et potentiel des migrants. Ces derniers doivent être considérés, à la fois dans les pays d’accueil et dans les pays d’origine, comme des acteurs et des partenaires appuyant les efforts de développement. A cet égard, le renforcement de la coopération multilatérale demeure la voie incontournable pour développer les liens entre migration et développement. Il s’agit donc de définir les modalités d’action de cette coopération en concertation entre pays émetteurs et récepteurs de flux migratoires.
Plusieurs possibilités sont ouvertes :
- Reconnaître les associations de migrants comme des associations de solidarité internationale à part entière ;
- Encourager le partenariat entre les associations et les communautés des régions d'origine avec les associations de migrants et les autres associations de solidarité internationale ;
- Faciliter la mobilisation des ressources financières, en épargne et en crédit, et des compétences au niveau des associations partenaires ;
- Définir des accords-cadres au niveau des régions tenant compte des spécificités des situations et de la détermination des intérêts communs.
C’est à ce type de défis que les villes francophones sont appelées à unir leurs efforts pour que le mouvement migratoire soit maitriser dans le sens de devenir un facteur de développement.
Fait à Kinshasa, le 8 janvier 2018
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