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Accueil du site > Tribune Libre > Les chênes qu’on abat : Les mois de décembre funestes

Les chênes qu’on abat : Les mois de décembre funestes

 « Lorsque nous serons libres, il se passera des choses terribles ; on n'oubliera pas toutes les souffrances de notre peuple pour se disputer les places. Ce sera une lutte pour le pouvoir. Nous sommes en pleine guerre et certains y pensent déjà. Oui, j'aimerais mieux mourir au combat avant la fin. »

Larbi BenMhidi

 

Ce mois de décembre est pour les Algériens un mois de tristesse en ce sens que des hommes politiques qui ont, chacun à sa façon, aimé l'Algérie et en sont morts. Le premier d'entre eux, Abane Ramdane, que l'on commence enfin à réhabiliter a eu une mort violente de la part de ses compagnons de combat. Avec Ferhat Abbas, c'est au contraire, le combat des idées qui, malheureusement ne sont toujours pas à l'honneur dans cette Algérie qui peine à se redéployer. 

Un patriote qui n’a jamais accepté le fait accompli du hold up du pouvoir par Ben Bella, en l’occurrence Hocine Ait Ahmed eut une vie toute entière au combat pour la liberté du pays et ensuite pour l’instauration d’un Etat démocratique qui consacre les libertés individuelles et le multipartisme avec une indépendance de la justice. Sa mort il y a deux ans est plus que jamais actuelle et son combat - à l’instar des prédécesseurs Abane Ramdane et Ferhat Abbas - pour une Algérie ouverte sur l’universel tolérante, est toujours d’actualité.

Avec Boumedienne qui eut un comportement ambivalent, nous retenons de lui la lutte pour une Algérie qui prenait en charge son destin et ce qui reste du tissu industriel date de son époque. Enfin j'ai tenu à rendre un hommage à Franz Fanon un « Juste » qui a aimé et éefendu par la plume l'Algérie à en mourir

Abane Ramdane, l'un des architectes du congrès de la Soummam

Abane Ramdane est né un 10 juin 1920. Surnommé « l'architecte de la révolution », il a joué un rôle clé dans l'organisation de la lutte pour l'indépendance de l'Algérie Suite à l'affaire du « complot de l'OS », en 1950, Il est arrêté dans l'Ouest et subira plusieurs semaines d'interrogatoire et de torture. En 1951, il est jugé et condamné à 5 ans de prison, 10 ans d'interdiction de séjour, 10 ans de privation des droits civiques et 500 000 francs d'amende. Il connaîtra plusieurs prisons en Algérie, puis en France. Après sa libération, en janvier 1955, c'est Abane qui organise et rationalise la lutte. Il rassemble toutes les forces politiques au sein du FLN et donne à la « rébellion » de Novembre 1954 une autre dimension, celle d'un grand mouvement de résistance nationale. Il organise avec Larbi Ben M'hidi le congrès de la Soummam le 20 Août 1956 à Ifri.

« Avec Larbi Ben M'hidi et Yacef Saâdi écrit Zineb Merzouk, il déclenche la bataille d'Alger. Et après l'assassinat de Ben M'hidi, il devient le numéro un de la Révolution, mais doit quitter le pays. Il gagne Tunis via le Maroc, après une longue marche de plus d'un mois. Dans la capitale tunisienne, il se heurte aux colonels de l'ALN. Il leur reproche leur autoritarisme et l'abandon de la primauté du politique et de l'intérieur, adoptée à la Soummam, ce qui lui vaut des inimitiés. Le 29 mai 1958, le journal El Moudjahid annonçait à la une « Abane Ramdane est mort au champ d'honneur », mais la vérité est ailleurs. L'architecte de la Révolution a été attiré dans un guet-apens organisé par les colonels du CCE. Il est mort assassiné le 27 décembre 1957, dans une ferme isolée entre Tétouan et Tanger au Maroc. Il a été étranglé par deux hommes de main de Abdelhafid Boussouf. » (1)

Mohamed Lebjaoui rapporte dans son ouvrage « Vérités sur la Révolution algérienne » paru aux Editions Gallimard : « J'ai demandé à Belkacem Krim ce qu'il pouvait répondre à ces accusations. Et voici, très fidèlement rapportée, la version des faits qu'il m'a donnée : « Abane, dit-il, faisait un « travail fractionnel « et tentait de dresser aussi bien les maquisards que les militants contre les autres membres du C.C.E. Plusieurs démarches furent faites auprès de lui pour le convaincre de modifier son attitude. En vain : on constate qu'Abane, loin de se modérer, persistait dans la même voie en aggravant ses attaques. Nous décidâmes alors - continue Krim - Ben Tobbal, Boussouf, Mahmoud Chérif, Ouamrane et moi-même, de le mettre en état d'arrestation en vue de le juger par la suite. Ni Ferhat Abbas ni Ben Khedda ni Sâad Dahleb ni Mehri n'ont été tenus au courant. »

Beaucoup de choses ont été écrites pour continuer à diaboliser Abane Ramdane qui continue à hanter les consciences et d'une certaine façon -légitimer- la mort violente de l'architecte de la Révolution. Dans un essai objectif et très riche d'informations de première main, notamment de la plupart des acteurs de ce drame, le professeur Belaïd Ramdane raconte « comment le complot a été ourdi et comment la solution 'finale'' coulait de source malgré les dénégations des principaux acteurs de cette tragédie ». (2)

Il est vrai que Abane Ramdane était, dit on, un homme entier, monolithique, mais c'était un pur. Au-delà des luttes pour le pouvoir invoquées par ceux qui y tenaient, c'est le projet politique de la plate-forme de la Soummam qui était révolutionnaire en se sens qu'il projetait l'Algérie dans une dynamique de progrès, de démocratie adossée à un vivre ensemble de tous les Algériens quelles que soient leurs espérances. Il fallait simplement se dire algériens et accepter les lois de la République qui devraient être les seules repères pour les Algériens.

Ferhat Abbas, un patriote au long cours

Il y a 32 ans, le 25 décembre 1985, nous quittait à jamais Ferhat Abbas, le premier président de l'Algérie combattante. Il n'est pas aisé de cerner le personnage tant il est vrai qu'après un parcours académique, Ferhat Abbas eut une carrière toute entière dévouée à la liberté et à la justice. Ferhat Abbas était déjà conscient de la nécessité d'un combat contre l'injustice et le colonialisme quand la plupart des révolutionnaires qui ont pris en charge le destin du pays n'étaient pas nés. Faisant preuve de pondération, de sagesse, beaucoup lui ont reproché les tentatives d'appel à une Algérie plurielle à l'ombre des lois d'une République Algérienne Démocratique et équidistante des espérances religieuses.

Ce sera le seul révolutionnaire qui, après avoir tenté vainement de faire entendre raison au pouvoir colonial par les moyens d'une lutte politique, se tourna vers ce qu'il pensait comme évitable, la lutte armée. Naturellement, un homme de paix est par principe contre la violence. On rapporte qu'il rentra dans une grande colère quand il apprit le sort de Abane Ramdane qu'il admirait pour ses principes et sa rigueur Après l'indépendance il tenta là encore de ramener un peu de sérénité en acceptant le poste de président de la première Assemblée Algérienne. Mais les manoeuvres qui commençaient à faire jour pour la prise du pouvoir à travers un parti unique lui ont fait prendre conscience des dangereuses dérives..

Il s'en explique dans sa lettre de démission dont nous reproduisons des extraits : « Donner une Constitution à la République est un acte d'une extrême importance. Il requiert notre réflexion, notre sagesse. (...) Avant d'engager l'avenir, celui du pays, celui de nos femmes et de nos enfants, chacun de nous doit prendre conscience de ses responsabilités pour mieux les assumer. Sinon, il renonce, par un lâche opportunisme, au devoir élémentaire de tout citoyen. (...) A un mois de la fin de notre mandat, ce projet vient à peine de parvenir à l'Assemblée. Par contre, par la presse, par la radio, par les conférences, dites des cadres, par des déclarations ministérielles, on tente de l'imposer au peuple. (...) Humilier une Assemblée souveraine, qui a toujours apporté sa collaboration loyale et son appui au gouvernement, est un geste extrêmement grave. »(3)

S'insurgeant contre des personnes choisies, il écrit : « Qui a choisi ces prétendus cadres ? Selon quels critères ce choix a été fait ? (...) Le F.L.N. ne doit pas être le parti d'une faction, mais celui du peuple Sinon il devient un sujet de division et ne peut faire qu'un travail fractionnel. Les mots sont impuissants à traduire l'amère réalité....La concentration des pouvoirs entre les mêmes mains relève d'une autre forme de délire. Le projet de Constitution fait du président de la République, en même temps que le chef de l'État, le chef du gouvernement et le chef du Parti. Pratiquement il n'y a plus de démocratie. « La révolution se fait par le peuple et pour le peuple. » (sic) Ce slogan officiel, affiché sur nos murs et repris par la radio, est une contrevérité. Il masque la réalité. Quant à notre jeunesse, elle sera condamnée à ne plus penser. Le régime fabriquera des robots, des opportunistes et des courtisans. » (3)

« Assurer le pain au peuple est, certes, un objectif primordial. Lui assurer cet autre pain qu'est la liberté de pensée et d'expression est également un bien précieux. (...) L'équilibre des pouvoirs n'existe pas. Aucun recours contre les abus d'autorité n'est prévu. Il y a bien une disposition du projet de la Constitution qui prévoit que l'Assemblée nationale peut voter une motion de censure et renverser le chef de l'État. (...) Nous jouons à « pile ou face » le sort du pays. (...) Un chef du gouvernement, investi par une Assemblée nationale souveraine et responsable devant elle, est la seule formule qui corresponde à notre devise « par le peuple et pour le peuple ». Il est indispensable que le chef du gouvernement soit contrôlé. Il est indispensable qu'il rende des comptes aux représentants de la nation. (...) Depuis l'indépendance le peuple n'a pas encore été une seule fois librement consulté. Il est temps qu'il retrouve son enthousiasme et sa foi. Ce peuple sait voter. Nous devons lui faire confiance. Il a mérité mieux que cette suprême injure. » (3)

Ait Ahmed le guerrier, le diplomate, l’Homme d’Etat

Le dernier des architectes du premier novembre nous quitté le 25 décembre 2015 Qui connaît ce révolutionnaire de trente ans traqué dès son jeune âge de lycéen (16 ans), vivant dans la clandestinité et qui à vingt ans s'affirmait déjà comme un chef ? Les jeunes actuels - non instruits dans l'histoire de leur pays, toute l'histoire rien que l'histoire- donnent l'impression d'une fausse Indifference. La plupart de ceux qui ont fait la révolution étaient trentenaires. Ait Ahmed avait 30 ans juste lors du congrès de la Soummam. C'est dire si nous sommes des nains juchés sur les épaules de ces géants. Je ne vais pas redire tout ce que l'on sait et ne pas répéter les mêmes témoignages, je vais essayer de décrire pourquoi ce révolutionnaire au plein sens du terme a sacrifié sa jeunesse, une vie paisible en faisant, comme beaucoup, « le minimum syndical » pour la révolution et revendiquer ensuite sa part de butin déclinée d'une façon multiforme » (4).

« Dernier symbole des hommes qui ont enfanté Novembre, écrit Chaabane Bensaci Hocine Aït Ahmed incarne, par-dessus tout, le militant qui n'a jamais cessé de lutter pour la promotion et la défense des droits de l'homme et pour l'unité du Maghreb. Depuis la création du Front des forces socialistes, en septembre 1963, il a inlassablement assumé un rôle modérateur d'encadrement politique des militants afin d'empêcher l'irruption de la violence et d'inscrire la revendication linguistique et culturelle dans l'exigence du pluralisme politique, à l'intérieur de la nation algérienne. Car l'homme a eu un attachement indéfectible à cette nation pour laquelle il a consacré sa vie entière et qu'il a, en toutes circonstances, et malgré toutes les vicissitudes de la vie politique et des ambitions qui la caractérisent, les unes fructueuses et les autres désastreuses, placé, au-dessus de toute autre considération. L'enfant terrible de la Révolution algérienne savait mieux que quiconque jouer le modérateur, comme en témoigne sa réconciliation avec Ahmed Ben Bella, un 16 décembre 1985, à Londres, ou ses retours triomphaux à Alger, comme en décembre 1989, après 23 ans d'exil forcé, ou encore en janvier 1992, pour la plus grande manifestation que la capitale ait jamais connue. Son engagement militant a toujours été empreint de ces convictions fortes, inébranlables même, car il rêvait d'une Algérie nourrie aux valeurs démocratiques universelles où l'alternance au pouvoir, la liberté de culte, la primauté de la loi légitime sur toute autre loi issue d'assemblées non élues légitimement, l'égalité des citoyens sans distinction d'aucune sorte, l'accession au pouvoir par des moyens pacifiques, le rejet de la violence pour se maintenir au pouvoir ou pour y parvenir, seraient des vertus cardinales pour tout un chacun » (5)

« Quand Ait Ahmed revient le 15 décembre 1989, après vingt-trois ans d'exil. Les Algériens sont venus nombreux, du fin fond de la Kabylie, sa région natale, mais aussi du reste du pays, lui souhaiter la bienvenue. : « Mon sentiment déclare-t-il est un sentiment de joie et de bonheur. J'ai quitté mon pays après m'être enfui de prison au printemps 1966. C'était un réel déchirement. Mais celui que je ressens aujourd'hui est plus grand encore parce que je me demande, à l'âge de soixante-trois ans, qu'est-ce que je peux faire ? ». « Essayer d'apporter une contribution de sagesse, une certaine expérience, mais d'abord, et avant tout, renforcer la paix civile en posant les problèmes d'une manière claire et nette. » (4)

« Je suis pour tout ce qui tend vers la démocratie, mais la démocratie, c'est votre affaire à vous ! » Tous les problèmes de l'heure sont abordés. « L'islam ? C'est la religion de tous les musulmans. Nous devons veiller à ce que la politique n'exploite pas la religion. Nous demandons à l'islam d'apporter un plus à la démocratie, pas un moins. » « L'école et les langues ? « je refuse que la langue soit assimilée à l'obscurantisme. J'ai toujours engagé mes amis politiques à apprendre l'arabe. J'engage mes compatriotes arabophones à apprendre l'amazighe (le berbère). « Quant au français, c'est une langue que nous connaissons. C'est un acquis que nous devons défendre. ». « Je prends votre accueil comme un engagement de votre part à ne pas rester les bras croisés, à vous battre et à ne plus exercer la violence les uns envers les autres », a-t-il conclu » (4).

« Qui parlera de l'histoire du pays aux jeunes ? Qui leur apprendra que l'histoire n'est pas une grande surface où on ne prend que ce qui nous intéresse, c'est de fait une vente concomitante où on revendique toute notre histoire sans en faire un fonds de commerce. Les Algériennes et les Algériens ont perdu en Ait Ahmed un de ces géants de la dernière période de l'épopée libératrice, une personnalité que l'on aurait pu écouter, nous faire revivre la révolution. Les jeunes sont étonnés de découvrir ce nom mythique d'héros de la Révolution au moment de sa mort- On l'aura compris, il ne restera plus que des personnes qui parleront de la Révolution par procuration, selon l'air du temps et nous aurons raté une étape importante dans l'édification de la Nation, celle de son histoire avec ses heurs et ses malheurs, ses zones d'ombre et ses périodes fastes. Les jeunes ne doivent pas continuer à être en apesanteur identitaire en perte de repères et dont l'imaginaire est ouvert à tous les vents mauvais de l'effritement identitaire ». (4)

Boumediene : un homme d'Etat

Le 27 décembre 1978 disparaissait Houari Boumediene. L'artisan des trois révolutions. Dans la vie de Boumediene on peut distinguer deux étapes : celle de la prise violente du pouvoir à l'été 1963. L'histoire est assez documentée. Je veux rapporter dans ces lignes l'autre facette celle de l'artisan de la construction d'un Etat qui résiste aux hommes. : « Qui se souvient du fameux coup d'éclair dans un ciel serein que fut la décision de Houari Boumediene qui annonçait à la face du monde par son mémorable « Kararna ta'emime el mahroukate » « Nous avons décidé souverainement de nationaliser les hydrocarbures » ? Longtemps après, ceux qui sont honnêtes avec l'Histoire, se remémoreront cette phrase qui changea le destin pétrolier de l'Algérie. Les accords d'Evian avaient d'une certaine façon perpétué un « ordre » qui était celui de l'exploitation du pétrole par les multinationales.

Boumediene avait été gagné au goût de l´action diplomatique. Il voulait donner à l´Algérie une place qu´elle n´avait jamais occupée auparavant sur la scène internationale. Le Sommet des Non-Alignés de 1973 a constitué une étape fondamentale qui a servi de tremplin. L´apothéose de ce redéploiement diplomatique fut, incontestablement, la participation de Boumediene, en avril 1974, à la session spéciale de l'Assemblée générale de l´ONU où il a prononcé un discours mémorable sur le Nouvel ordre économique international. Dans son fameux discours, il avertissait. Boumediene ne se faisait pas d'illusion sur le Monde arabe. « J'ai moi-même découvert avec étonnement et consternation que les Égyptiens et par extension les peuples du Machrek et leurs dirigeants ne connaissaient ni le Maghreb ni les Maghrébins. Lorsqu'ils en parlaient ou lorsqu'ils les rencontraient, ces gens traitaient les Maghrébins avec condescendance et même avec mépris. » Il est vrai que, depuis, nous avons, de fait, basculé vers la métropole moyen-orientale dans ce qu'elle a de moins glorieux, le farniente, la fatalité et en définitive l'installation dans les temps morts par rapport aux changements spectaculaires constatés dans les pays développés. » (4)

« Boumediene, écrit Mohamed Chafik Mesbah, continue de réveiller chez le peuple algérien un profond sentiment de fierté nationale. Il continue de symboliser les aspirations populaires à la justice sociale et au progrès économique. Le peuple algérien respecte l'intégrité de Boumediene, lequel ayant adopté un mode de vie confinant à l'ascétisme, est resté à l'abri des tentations mercantiles auxquelles n'ont pas résisté bien d'autres responsables de son époque. (...) Sur le plan du mode de gouvernance et des choix politiques sur lesquels il repose, soulignons que Boumediene aurait consacré l'intégralité des recettes pétrolières à l'investissement productif. Boumediene, par ailleurs, est un nationaliste ombrageux et déterminé. (...) C'est, sans doute, cette capacité à agir, pragmatiquement, qui explique que, nonobstant ses positions tranchées de politique étrangère, Boumediene ait pu entretenir des relations économiques solides, mutuellement profitables, avec les Etats-Unis(6).

Au moment où de par le monde on élabore des stratégies sur l'avenir, nous, nous sommes spectateurs de notre destin, à telle enseigne que nous sommes une variable de négoce entre la Turquie et la France. Mieux, nos partis politiques, qu'ils soient dans le pouvoir ou à côté s'agitent frénétiquement en prévision de la prochaine répartition des prébendes législatives sans naturellement, sans aucune perspective digne d'emporter l'adhésion des jeunes. On peut sans doute reprocher beaucoup de choses à Boumediene, mais c'était un Homme d'Etat au sens de la définition suivante. « Un homme politique pense aux prochaines élections, un homme d'Etat pense aux prochaines générations. » Tout est dit » (6)

Frantz Fanon Le Juste et le défenseur des bonnes causes.

Il y a cinquante six ans, mourait Frantz Fanon, emporté par une leucémie à l'âge de 36 ans. Peu d'Algériens connaissent Frantz Fanon qui s'est battu à en mourir pour l'indépendance de l'Algérie. Frantz Fanon est né à Fort-de-France, en Martinique, Dès le début de la guerre de Libération nationale du 1er Novembre 1954 en Algérie, Frantz Fanon s'engage auprès de la résistance nationaliste Expulsé d'Algérie en 1957, il rejoint le FLN à Tunis, où il collabore à son organe central de presse El Moudjahid. En mars 1960, il sera nommé ambassadeur du Gouvernement provisoire de la République algérienne au Ghana. Se sachant atteint d'une leucémie, il se retire à Washington pour écrire les Damnés de la terre. Frantz Fanon est mort le 6 décembre 1961 quelques mois avant l'indépendance de l'Algérie. Conformément à son voeu d'être enterré en terre algérienne, sa dépouille sera inhumée au cimetière des chouhada près de la frontière algéro-tunisienne, dans la commune de Aïn Kerma C'est dire si quelque part, nous avons failli envers ce géant qui voulait, comme il l'écrit, mourir pour l'Algérie. « Nous ne sommes rien sur cette terre si nous ne sommes d'abord les esclaves d'une cause, de la cause des peuples, la cause de la justice et de la liberté. Je veux que vous sachiez que même au moment où les médecins avaient désespéré, je pensais encore, oh ! dans le brouillard, je pensais au peuple algérien, aux peuples du Tiers-Monde et si j'ai tenu, c'est à cause d'eux. »(7)

La lutte pour le pouvoir a terni l'aura de la révolution. Ben M'hidi avait raison de le dire. Ces quelques rappels concernant des hommes illustres qui, à des degrés divers, se sont engagés pour une vision de l'Algérie tolérante ouverte sur l'universel et s'occupant réellement de sa jeunesse méritent d'être médités. Nous sommes en 2017 avec une Algérie ouverte à tout vent, qui devrait être la prunelle de ses yeux en lui offrant un système éducatif de qualité qui devrait être la seule légitimité future. Nous devons aller vers une autre indépendance en ne misant que sur notre compétence pour proposer à la jeunesse un cap basé sur un effort collectif et non sur une rente qui fait indexer sa loi de finances sur les convulsions d'un baril erratique Non ! l'Algérie du million de martyrs mérite un meilleur destin.

 

1.Zineb Merzouk http://www.babzman.com/27-decembre-1957-assassinat-de-abane-ramdane/

2.Belaïd Ramdane : Vérités sans tabous sur l'assassinat de Abane Ramdane. Qui, Comment ? Pourquoi ? Et après ? Editions Dar el Othmania Alger 2017

3. Ferhat Abbas : Pourquoi je ne suis pas d'accord avec le projet de Constitution établi par le Gouvernement ? Lettre de démission du 12 août 1963
4. http://www.lexpressiondz.com/chroniques/analyses_du_professeur_chitour/232368-il-etait-une-fois-la-revolution.html

5. http://www.lexpressiondz.com/actualite/232162-un-geant-s-en-va.html

6.. http://www.alterinfo.net/HOUARI-BOUMEDIENE-Un-Homme-d-Etat-du-temps-present_a68656.html

7.Lettre à Roger Taïeb http://www.frantzfanoninternational.org/spip.php?article93 oct 61

 

Article de référence http://www.lexpressiondz.com/chroniques/analyses_du_professeur _chitour/282855-les-mois-de-decembre-funestes.html

 

Professeur Chems Eddine Chitour

Ecole Polytechnique Alger


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