Du Capitole à la Roche Tarpéienne
Qu’est-ce qui explique cette usure de plus en plus prématurée de ceux qui accèdent à la magistrature suprême ? Ils ne mettent même pas un an avant de décevoir « grave » ceux qui lui ont accordé leur confiance.
Il est certain que l’époque contemporaine qui fait son beurre sur la versatilité de l’opinion en lançant des modes successives et des gadgets sans intérêt majeur qui deviennent vite des « musts » pour les obsédés du dernier cri, il est certain que toute cette ambiance où l’obsolescence des objets est programmée et où une bonne partie de la production vise au renouvellement précoce ( donc au gaspillage ) et non prioritairement à doter le citoyen d’un confort durable, où la sacro-sainte croissance est érigée en mythe fondateur du fonctionnement démocratique et où son atonie devient un virus mortel qui ouvre la voie à tous les charlatanismes politiques, dans ces conditions il était quasi inévitable que l’opinion publique consommât la politique comme elle le fait de tout ce qui s’achète avec en toile de fond l’objectif de s’en débarrasser si le « produit » ne convient pas.
Ce qui est en toute logique le cas puisque Macron - comme la plupart des autres prétendants - a utilisé tous les artifices de la publicité et en premier lieu le mensonge ou les fausses affirmations ( cela s’appelle de la propagande ) pour fourguer sa nécessairement périssable camelote.
Le débat d’idées réel n’est d'évidence pas soluble dans la campagne publicitaire de lancement d’un nouveau produit ( la république en marche n’est rien d’autre ) c’est dès lors pourquoi les autoproclamés « sachants » ont décrété la fin des idéologies pour mieux inscrire la population dans le consumérisme, une idéologie par ailleurs censée couvrir tout le spectre des revendications populaires à qui on vend du rêve à défaut de satisfaire concrètement les appétits plus vitaux.
En politique, quand la désaffection renverse les perspectives avec le discrédit qu’on pressentait des formations appelées traditionnellement à se relayer, on assiste à des transgressions comme l’élection de Macron, quelqu’un qui n’est pas du sérail en ce sens qu’il n’a aucun parcours politique classique mais qui dispose d’une formation intellectuelle et professionnelle en tout point compatible avec les élites qui se partagent les sphères du pouvoir.
Le contenant a rassemblé des suffrages que le contenu aurait dû dissuader. Il est vrai aussi qu’opposé au néant destructeur le contenant affichait des traits sympathiques.
Ainsi, comme il était prévisible, les nuages se sont-ils très rapidement amoncelés sur Macron : les gens l’avaient cru intelligent, plein de détermination et d’une loyauté à ses engagements au-delà de tout soupçon et le retrouve tel qu’en lui-même aussi sommaire que ses prédécesseurs, hésitant, soumis à des vents contraires, peu enclin à respecter les promesses de candidature auxquelles une majorité avait adhéré mais donnant envers et contre tout satisfaction à ses maîtres.
Devant les orages qui ne sont pas uniquement d’origine sociale mais aussi sociétale comme viennent de l’affirmer ces milliers de manifestants, jeunes le plus souvent, manifestant pour un monde décarboné et vivable,les gens le voient finalement comme un être empli de fourberie, un fat qui bombe le torse mais baisse la tête à la première salve.
Intelligent, il l’est certes et même au-delà de la moyenne mais il n’a mis cette intelligence qu’au service de ses ambitions personnelles qu’il a eu l’audace ou la prescience de prétendre faire coïncider avec l’intérêt de la France, intérêt défini dans les cénacles oligarchiques...
Pour être élu il a mis en branle des réseaux qu’il avait eu la sagesse de susciter ou qu’on avait eu l’intelligence de l’aider à monter. Partout en France sont sortis comme champignons après la pluie des comités de soutien actifs.
Macron suivait en cela les recettes qui avaient fait le bonheur de la Gauche aux temps où celle-ci n’avait pas encore abandonné par lassitude ou désintérêt le haut du pavé pour se réfugier dans le confort des rentes de situation qu’elle croyait acquises et qui se sont révélées tellement fragiles qu’elles ont abouti à la quasi-disparition du PS et du PC.
Un PS qui cherche maintenant son salut en ralliant pour les Européennes la bannière d’un aventurier que ses tribulations au gré de ses amourettes ont conduit au sein du pouvoir géorgien, un peu en Ukraine aussi où il y avait sans doute à l’occasion de la révolution ( confisquée par les nèo-nazis ) de la Place Maïdan une place intéressante à prendre. Dans l’ombre des puissants certes mais à un poste de responsabilité.
Raphaël Glucksmann dont l’ex-femme Eka Zgouladze, fut ministre de Saakachvili, président de la Géorgie qui n’a pas laissé que de bons souvenirs et lui obtint un poste de conseiller.
Saakachvili comme Zgouladze se sont ensuite transmutés en Ukrainiens où le premier fut président d’Oblast ( région ) et elle membre de la Rada ( parlement ) et ministre ou vice-ministre de l’Intérieur.
Ainsi va la vie dans ces contrées tumultueuses où les autocrates sont les sujets de transferts comme de vulgaires joueurs de foot.
Notre Glucksmann ( sa compagne Léa Salamé se met en retrait, ce qui nous épargnera pendant un certain temps ses minauderies affectées ) est donc chargé de sauver le PS d’Olivier Faure du naufrage auquel le condamne la prochaine joute européenne.
Cette union un peu ( un peu est une manifestation de mon goût pour la litote ) hybride qui se veut de gauche promue par un essayiste - qui fut ( et est peut-être toujours dans son for intérieur ) de droite libérale bon teint grand crû - n’est qu’un rassemblement d’éclopés où le paralytique guide les pas de l’aveugle.
On comprend que cet attelage biscornu ne suscite guère l’enthousiasme des autres courants et c’est d’une certaine manière justice.
Thomas Porcher qui figura, de manière assez surprenante au demeurant, parmi les fondateurs du mouvement de Glucksmann « Place Publique » a finalement pris ses distances avec cette opération de sauvetage d’un parti moribond.
Pour en revenir au Président Macron, ce dernier doit slalomer entre des revendications contradictoires qu’il n’a en aucune manière la possibilité de rencontrer d’autant plus que sa formation et son adhésion au système ne sont en aucun cas solubles dans une vraie politique soucieuse de l’environnement et qui correspondrait aux exigences de ceux qui tirent les conséquences du dérèglement climatique et seront amenés logiquement à les vivre dans leur chair.
Entre les revendications à caractère social de ceux qui ont participé au grand barnum ( qu’il a eu tout de même le mérite d’organiser, même s’il a bien veillé à encadrer le processus ) et le respect des injonctions impératives de la Communauté Européenne qui n’est que le bras séculier de la toute puissante Allemagne, le chemin est étroit ( c’est même une piste à peine praticable ) pour habiller les uns de hardes à peine mettables sans détrousser les autres de leurs oripeaux, quand bien même vestiges passés de leur splendeur.
Pour en revenir à l’obsolescence de plus en plus rapide des dirigeants élus ( mal élus en raison du fort taux d‘abstention qui est un autre symptôme de la crise de la démocratie parlementaire à la sauce de la 5e république ) on ne peut qu’en acter la réalité et tenter d’essayer d’y apporter des remèdes.
Quand les Institutions ne jouent plus le rôle qu’elles sont censées remplir, le temps est venu d’en changer et de ne pas s’y accrocher par conservatisme envers et contre tous les signaux qui attestent leurs dysfonctionnements.
En cela le RIC ( Référendum d’initiative Citoyenne ) fait bien partie du remède.
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