AREVA devient ORANO
Comme la Société Générale d’Entreprises est devenue VINCI, comme France Télécom est devenue Orange, comme Printemps-Pinaut-Redoute (PPR) est devenu KERING. Etc.
Quand on a des escoubilles à cacher sous le tapis, on change de nom ?
ORANO, un nom dérivé du latin Uranus, qui a donné son nom à l’uranium. C’est vrai qu’il faut vite faire oublier jusqu’au nom d’AREVA, symbole d’un des plus grands naufrages industriels français. Et pas que… L’entreprise a été recapitalisée à hauteur de 4,5 milliards d’euros avec notre fric puisque l’État en est actionnaire à plus de 98 %. L’ex-fleuron du nucléaire français comprenait plusieurs branches : - l’activité réacteur atomiques (New NP) passé sous le contrôle d’EDF (encore nos sous !) ; - les établissements Areva NP, notamment Creusot Forges qui s’est brillamment illustré avec les déboires de la cuve de l’EPR ; - l’activité du cycle du combustible nucléaire (New Areva et NewCo (là encore contrôlé par l’État). Il ne lui reste plus que Areva SA, activités de production et de recyclage du combustible nucléaire, plus le sac d’emmerdes du chantier de l’EPR d’Olliluoto 3, l’EPR finlandais.
Orano va donc se concentrer sur l’activité de tout le cycle du combustible nucléaire, de l’extraction au démantèlement des centrales arrêtées en passant par l’enrichissement et le recyclage des combustibles usés. Ce n’est pas la partie la plus réjouissante avec le retrait du nucléaire de la plupart des pays développés, à l’image de l’Allemagne et un prix de l’uranium qui a baissé des deux tiers depuis 2011. Mais, Jupitounet – un parent d’Orano finalement – s’est gargarisé lors de son voyage en Chine, de la construction dans ce pays d’une usine de retraitement des combustibles usés, genre La Hague, pour un montant de 10 milliards d’euros. Mouais… À part que ce n’est pas encore signé…
« Orano » ! C’est joli ça. Propre sur soi. Facile à prononcer dans toutes les langues qu’ils ont dit les « communicants ». Sauf que si on creuse un peu… Orano, ça vient d’Ouranos, que les Romains, pilleurs de la civilisation grecque, appelèrent Uranus d’où vient le nom du minerai nucléaire uranium. Ouranos, c’est le julot de Gaïa, la Terre-Mère. Attention, c’est un couple rugueux ! Ils ont fait des palanquées de lardons particulièrement gratinés : entre autres les Cyclopes, les Titans parmi lesquels un caïd particulièrement vindicatif, Cronos. Celui-ci, en complicité avec sa mère Gaïa, qui se carcagnait régulièrement avec son mec Ouranos, coupe à son père le service trois-pièces : Monsieur le maire et ses deux adjoints en quelque sorte. Devenu calife à la place du calife, Cronos épouse sa frangine Rhéa et règne sur l’Olympe. Exit Ouranos. Sacrée famille !
Areva, - maintenant donc Orano - « fleuron » de notre industrie nucléaire avec une perte abyssale de 4,9 milliards d’euros, a été sauvé de la faillite par notre pognon. On a donc piqué dans la poche des contribuables – contribuable mais aussi citoyens en majorité critiques vis-à-vis de l’industrie nucléaire – des milliards pour sauver une industrie passéiste, mortifère, gérée de manière aussi irresponsable qu’incompétente par une caste (le corps des Mines, Polytechnique).
Comment en est-on arrivé là ?
D’abord, il y a l’EPR. Ce réacteur « nouvelle génération » s’est avéré catastrophique. Son coût a quasi triplé, passant de 3 milliards à près de 9 milliards et ce n’est pas fini. Il n’est pas au point techniquement, comme le prouvent les innombrables retards dus à des éléments de constructions défectueux à refaire, à des défauts de sûreté suite au nouveau cahier des charges tenant compte de la catastrophe de Fukushima, etc. Ce qui se passe à Flamanville, en Normandie, se passe aussi, en pire, sur le chantier de l’EPR en construction à Olkiluoto, en Finlande. Innombrables arrêts de construction, retards à répétition, magouilles dus à des entreprises de sous-traitance plus que douteuses qui sévissent aussi à Flamanville. Ce seul chantier finlandais a déjà généré une perte de 3,9 milliards d’euros et son coût est passé de 3 à 8,5 milliards d’euros. Et qui croyez-vous qui va payer la différence. Les Finlandais ? Tè ! Fume… Ce sont les contribuables français puisque ce chantier est assuré par la COFACE.
Et puis il y a le scandale UraMin, du nom d’une société canadienne qui a vendu aux « grosses têtes » d’Areva rien d’autre que du vent ! Le secteur minier étant le plus rentable, Areva s’est lancé dans une politique d’achat de sites uranifères partout dans le monde. C’est ainsi qu’elle s’est fait somptueusement enfler par une bande d’aigrefins, parmi lesquels apparaissent des noms bien connus en France. Areva a ainsi acheté pour 2,5 milliards de dollars, en 2007, à UraMin des sites soi-disant uranifères à Bakouma (République centre africaine), Trakkopje (Namibie) et Ryst Kuil (Afrique du Sud). On peut raisonnablement s’interroger sur le bien fondé de ces achats sans que la compagnie, référence mondiale en la matière, n’ait mené quelque expertise que ce soit sur la valeur exploitable de ces sites, se fiant aveuglément aux documents fournis par le « cabinet d’experts » anglo-saxon SRK payé… par les vendeurs ! Or, tout était archifaux, tant au plan des teneurs uranifères des minerais que des qualités du produit et des conditions d’exploitation. La teneur uranifère de ces « mines d’uranium » est moindre, paraît-il, que les délaissés des anciennes mines uranifères du Limousin et de Lozère ! Du bidon ! Que du bidon !
Mais il n’y a pas que ça. Il y a aussi l’impact d’Areva au Niger, pays d’Afrique pillé, ruiné, affamé. Arlit, ça ne vous dit rien ? Mais si voyons. Une prise d’otage au cours de laquelle des expatriés français ont été enlevés dans cette ville minière d’Areva. Ils ont été libérés après paiement d’une rançon estimée à 20 millions d’euros ! Sortis des poches d’Areva, donc de nos poches, puisque l’État français est l’actionnaire archi majoritaire. Eh bien à Arlit, la population locale a hérité de 50 millions de tonnes de résidus radioactifs stockés et Areva continue de pomper gratuitement 20 millions de mètres cubes d’eau par an pendant que la population meurt de soif ! Les rues, les habitations de la ville sont construits à l’aide de résidus radioactifs, la nappe phréatique est archi-contaminée et s’assèche suite aux pompages d’Areva. Qui, évidemment, la main sur le cœur, nie tout cela.
Le Niger devrait être l’un des pays les plus prospères d’Afrique grâce à son sous-sol riche en uranium. Tè, fume ! La population est toujours plus misérable et crève de malnutrition depuis des décennies à cause d’une sécheresse persistante. Cette famine est due au fait qu’Areva n’a jamais voulu faire bénéficier la population locale de son exploitation minière, en prenant en charge, ce qui serait le moins, l’irrigation des terres. Cet aménagement du fleuve Niger permettrait de gagner des milliers d’hectares de terres arables et ainsi d’éradiquer définitivement la faim dans ce pays de 12 millions d’habitants. Le coût estimé de cette irrigation capillaire du fleuve Niger est estimé à 650 millions d’euros, une goutte d’eau pour le principal industriel du pays.
Derrière les troubles dans lesquels l’armée française est engagée au Sahel, n’y aurait-il pas, entre autres, l’exploitation néocoloniale des ressources du Niger ?
Orano, c’est donc le nom d’un castré. Comme ce qui reste d’Areva en quelque sorte. Finalement le nom est bien choisi !
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