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Commentaire de Henri Alberti

sur Militantisme : école de médiocrité


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Henri Alberti 19 septembre 2007 19:29

“Ce que je retiens de votre article c’est le mot médiocrité...”

C’est ce qui ressort de plusieurs commentaires.

Il faudrait peut-être commencer par la définition de “médiocrité”, pour ce faire une idée plus exacte.

http://www.cnrtl.fr/lexicographie/m%C3%A9diocrit%C3%A9 ?

Le titre : Militantisme : école de médiocrité Ce qui veut dire que le militantisme est un apprentissage de la médiocrité selon l’auteur. A partir de là, ce qui veut dire, le minimum vital pour comprendre le texte, je ne vois pas trop la pertinence des arguments critiques envers ce texte.

Ce que dit l’auteur sur le fond ressemble à ceci ( TOUS les partis sont concernés ) :

“Telle est - esquissée - ma pensée. Et ma conviction, dès lors, m’engage à agir dans un sens dont mon sentiment ne veut rien savoir. Je me livre aux études théoriques préparatoires qui doivent m’aider à mettre en œuvre ma décision. Je cherche un programme économique qui garantisse la réalisation d’une démocratie pure, exaltante, capable de soulever de plus grandes masses encore. En attendant, bien sûr, je voterai social-démocrate ou libéral selon les circonstances ; mais il est clair que nous avons besoin de quelque chose qui nous arrache à la platitude des partis actuels et qu’à ce genre d’idées, il faut un programme économique à titre de décret d’application. Et je me pose ces questions naïves : qui cirera mes chaussures, qui charriera mes excréments, qui rampera pour moi, la nuit, dans les mines ? Mon « frère humain » ? Qui accomplira les gestes dont la réalisation correcte exige que l’on passe toute sa vie devant la même machine à faire la même chose ? Je puis imaginer nombre de tâches aujourd’hui méprisées et qui ont pourtant leur magie, dès lors qu’on les accomplit de plein gré. Mais qui voudra se charger de tous ces autres travaux auxquels la misère seule peut contraindre ? Avec cela, je veux des. voyages plus confortables qu’aujourd’hui et un courrier plus rapide. Je veux de meilleurs juges, de meilleurs logements. Je veux manger mieux. Je veux ne pas avoir à me fâcher contre l’agent du coin. Quoi donc ! moi, l’homme, qui suis l’habitant de cette terre, je ne pourrais pas obtenir de ce mien logement un confort un peu meilleur que son piètre confort actuel ? ! En attendant, nous faisons de la politique parce que nous ne savons rien. La façon dont nous nous y prenons le montre assez. Nos partis doivent leur existence à la peur des théories. A toute idée, songe avec effroi l’électeur, on peut toujours en opposer une autre. C’est pourquoi les partis se protègent mutuellement contre les deux ou trois idées dont ils ont hérité. Ils ne vivent pas de ce qu’ils promettent, mais de dénigrer les promesses des autres. Là est leur communauté d’intérêts tacite. Cette obstruction mutuelle qui n’autorise que de petits résultats pratiques, c’est ce qu’ils ont baptisé Realpolitik. Aucun d’eux ne sait vraiment où le fait d’obéir aux agrariens, aux exigences de la grande industrie ou à celles de la social-démocratie pourrait conduire. Ils ne veulent nullement faire de la politique ; ils veulent représenter des classes sociales et s’assurer l’oreille du gouvernement pour des revendications limitées. Je n’y verrais pas d’objection si, du même coup, ils laissaient la politique à d’autres ; mais non ! ils vont jusqu’à conserver, en les alliant à des avantages économiques immédiats des idéologies aussi dévaluées que le christianisme, le royalisme, le libéralisme et la social-démocratie. Et en ne les mettant jamais en pratique, ils leur prêtent une apparence de sens et de sainteté ce qui est, de surcroît, un péché contre l’esprit. J’ai la conviction qu’aucun de leurs programmes économiques n’est réalisable et qu’il ne faut même pas songer à en amender un seul. Ils seront emportés à la première bourrasque avec tout le fumier qui s’est accumulé sur une terre encore abritée du vent, ils se réduiront à des questions mal posées auxquelles on ne pourra plus répondre ni oui, ni non, à la première rafale de désir qui secouera le monde. Sans en avoir de preuves, je sais que nombreux sont ceux qui partagent mon attente. Pour le moment, le temps est encore au calme, nous sommes là comme dans une cage de verre sans oser risquer le moindre choc, de peur que tout ne vole aussitôt en éclats. Nous sommes pris, avec le meilleur de nous-mêmes : notre art, nos découvertes, dans le filet de la finance ... oui, nous aimons l’argent comme une sorte de dieu, de hasard, un organe irresponsable de décision. Croyons nous vraiment aucune organisation sociale en mesure d’encourager les bons artistes et d’évincer les mauvais ? De reconnaître à telle invention, à telle idée, une valeur qui ne se manifeste que des années plus tard ? Au fond, nous avons l’intime conviction que l’État est le dernier des imbéciles. L’argent non plus n’est pas réparti selon la justice, mais il l’est au moins selon le hasard et la chance - et ce n’est pas le désespoir institué que représenterait un État omnipotent. ”

Robert Musil. Novembre 1913. Le texte entier chez moi.


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