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Commentaire de Pie 3,14

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Pie 3,14 6 juillet 2007 18:18

Monsieur West,

Je suis étonné que vous trouviez le ton de mes commentaires agressif et méprisant envers les plasticiens. Je n’ai pas aimé votre article et j’ai tenté de vous expliquer pourquoi de manière argumentée et posée.

Vous répliquez en étalant vos états de services ( vos vénérables professeurs, votre statut autoproclamé de théoricien des Arts) et me reprochez de parler d’Histoire comme si elle m’appartenait. Je ne rentrerai pas dans ce petit jeu puéril un peu mégalomaniaque mais sachez que j’ai quelques compétences dans le domaine de l’Histoire sans ressentir le besoin d’étaler mon pédigree à la moindre critique.

Fin du procès en légitimité, revenons à l’essentiel.

« Génie » est un terme fourre-tout dont se méfient les historiens.Il relève d’une conception datée, celle des grands hommes.C’est l’Histoire du dixneuvième siècle, celle de Michelet et des débuts comme science universitaire. On peut qualifier la plupart des artistes repérés par l’histoire de l’Art de génies (de Praxitèle à Picasso)mais cela ne signifie pas grand chose. Pire,le mot gêne parce qu’il postule l’exception et empêche d’envisager l’artiste dans son contexte. On peut apprécier Dürer et reconnaître son grand talent sans le qualifier de génie toutes les trois lignes d’autant que ce que l’on sait de sa vie montre un parcours très classique.

Le cadre social est celui du corporatisme qui fabrique des générations d’artisans spécialisés. Dürer débute auprès de son père orfèvre et commence un apprentissage chez un peintre graveur voisin(à l’époque la distinction entre peintres, graveurs,orfèvre,sculpteurs et architectes est encore poreuse).Il est déjà un excellent dessinateur (cf : son autoportrait à l’âge de 13 ans) comme nombre de ses congénères qui, dès l’âge de cinq ou six ans s’initient auprès de leurs aînés dans l’atelier.

Devenu compagnon, il entame la période d’approfondissement dans des ateliers de Flandres, Colmar,Strasbourg, Bâle.Il séjourne quelques mois en Italie(Venise) qui devient un point de passage obligé à partir du quinzième puis revient à Nuremberg où il s’installe comme maître.Après 1500, ses gravures lui apportent renommée et commandes prestigieuses car Dürer, comme tout ses contemporains travaille à la commande. En faire le premier créateur « libre » de ses sujets est un anachronisme.Il existe certes des dessins et gravures paysagers ou anatomiques qui semblent faire exception mais ce sont des travaux préparatoires ou d’études qui fournissent des motifs pour les commandes. Cette trame est celle de presque tout les peintres qui ont connu le succès à cette époque,ni la vie ni l’oeuvre de Dürer ne se distingue fondamentalement de celle de ses contemporains et il n’est pas un « génie extra-terrestre » comme vous l’affirmez.

La bonne fortune de Dürer en matière de postérité est le fruit d’éléments où son talent(évident) n’est peut-être pas l’essentiel. Il n’a jamais été oublié et n’a pas eu besoin d’être « ressuscité » comme Vermeer ou De La Tour au vingtième siècle. Les commandes de Maximilien ou C Quint lui ont assuré une place dans les collections royales qui deviennent plus tard celles des musées mais surtout,ses écrits sur la perspective et les proportions(adaptation à l’allemande des reflexions italiennes) lui apportent une légitimité au lond terme auprès des historiens d’Art dès l’époque de Vasari. Il n’est pourtant ni le premier ni le seul à avoir adapté l’art du Nord aux modes venues d’Italie( Van Der Weyden, Van Der Goes, Memling,G David pour les plus connus),Il est celui qui écrit des textes qui n’ont pas été perdu.

Ces considérations n’enlèvent rien à la qualité de l’oeuvre de Dürer, elles visent simplement à relativiser les jugements que l’on peut porter sur lui ce qui est l’essence même du travail historique.

Or, votre texte ne cesse de prendre des libertés avec l’Histoire et multiplie les contresens(le fait que les romantiques se soient reconnus en lui ne signifie pas que Dürer annonce le romantisme.Le fait que la gravure connait un mode de diffusion populaire ne fait pas de lui « l’inventeur des grands appareils médiatiques »,d’ailleurs J Bosch, lui aussi, connait le succès avec la gravure populaire au même moment.

Je ne fait partie ni de vos courtisans ni de vos détracteurs acharnés. Seul m’importe le texte et si ma critique est parfois sévère, elle n’est ni méprisante ni gratuite.

Je trouve en revanche déplaisante cette manie que vous avez d’étaler votre raison sociale, comme un argument d’autorité, dès qu’un commentaire a l’heur de vous déplaire.Certains y verront peut-être un manque touchant de confiance en vous-même, je n’y vois que cuistrerie et vacuité.

ps:vous avez le droit de qualifier cette dernière phrase de franchement agressive.


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